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les mémoires et les recueils d’observations sur ce sujet ne sont guère sortis du domaine de la psychiatrie et la psychologie jusqu’ici n’en a pas tiré profit, du moins en ce qui concerne l’attention.

On est à peu près d’accord pour classer les idées fixes en trois grandes catégories :

1o Les idées fixes simples, d’une nature purement intellectuelle, qui restent le plus souvent renfermées dans la conscience ou qui ne se traduisent au dehors que par des actes insignifiants ;

2o Les idées fixes accompagnées d’émotions, telles que la terreur et l’angoisse (agoraphobie, folie du doute, etc.) ;

3o Les idées fixes à forme impulsive, connues sous le nom de tendances irrésistibles qui se traduisent par des actes violents ou criminels (vol, homicide, suicide).

Quoiqu’il n’y ait pas de démarcation tranchée entre les trois classes, on peut dire que la première a pour caractère spécifique un trouble de l’intelligence, que la seconde est plutôt de l’ordre affectif, que la troisième dépend d’un affaiblissement de la volonté. Ces deux dernières seront rigoureusement exclues de notre étude, parce qu’elles relèvent de la pathologie des sentiments et de la volonté. Il est bien préférable de nous en tenir strictement aux cas purs de tout alliage, à ceux qui sont rigoureusement comparables à l’état de monoïdéisme relatif qu’on appelle l’attention.

Même en se restreignant à ce groupe, les exemples d’idées fixes ne manquent pas. On leur a donné divers noms suivant leur caractère prédominant. Chez les uns l’idée fixe prend une forme mathématique (arithmomanie). Pourquoi les hommes ont-ils telle taille ? Pourquoi les maisons, telle dimension ? Pourquoi les arbres, telle hauteur ? et ainsi de suite à propos de chaque objet. — Plus souvent c’est un besoin sans fin de calculer, additionner, multiplier : « Une femme, ayant des symptômes nombreux d’hystérie, ne pouvait jeter les yeux sur une rue, sans se mettre aussitôt, et contre sa volonté, à calculer le nombre des pavés de cette rue, puis de toutes les rues de la ville, puis de toutes les villes d’Italie, puis des rivières et des fleuves. Si elle voyait un sac de blé, aussitôt commençait dans son cerveau un travail de numération sur le nombre des grains contenus

    Psychiatrie et Ueber Geistesstörungen durch Zwangsvorstellungen (Zeitschrift für Psychiatrie, t.  XXXV) ; Griesinger, Ueber ein wenig bekannten psychopathische Zustand (Archiv. für Psych.. t.  I) : Meschede ; Ueber Krankhafte Fragesucht (Zeit. für Psych., t.  XXVII) ; Buccola Le idee fisse e le loro condizione fisiopatologiche (1880) ; Tamburini, Sulla pazzia del dubbio e sulle idee fisse ed impulsive (1883) ; Luys, Des obsessions pathologiques (Encéphale. 1883) ; Charcot et Magnan, De l’onomatomanie (dans Archires de neurologie, 1885).