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Iule a des organes oculaires, un système nerveux, une bouche, un œsophage et un cœur, je ne la traiterai pas, malgré toutes les hypothèses des embryologistes, comme étant physiologiquement une cellule homogène, ainsi qu’une fibre musculaire, par exemple.

La taille ne fera rien à l’affaire. Pareils appétits, disait Montaigne, agitent un ciron et un éléphant. La vie psychique d’une abeille est aussi compliquée que celle d’une baleine, et, si un infusoire microscopique a des yeux, une bouche, des piquants et un cœur, c’est apparemment pour qu’il s’en serve, et par conséquent je le traiterai comme un être complexe, au même titre qu’un limaçon ou une sauterelle. L’embryologie ne m’en imposera pas au point de le regarder comme un être simple, parce qu’il dérive d’une cellule unique.

C’est donc, je pense, ce malheureux mot d’unicellulaires qui a fait croire à M. Binet que, les infusoires étant des êtres uni-cellulaires, la psychologie élémentaire de la cellule pouvait s’appliquer à eux. M. Binet s’est laissé séduire par un mot, ce qui arrive si souvent dans les choses de la science. Pour moi, afin d’éviter toute confusion, je dirais volontiers que la psychologie élémentaire de la cellule ne doit s’appliquer correctement qu’aux cellules homogènes ; car, pour les cellules complexes, êtres véritables, ayant des organes, des appareils mêmes, la psychologie devra être aussi complexe que celle des animaux complètement différenciés.

Les lois de l’irritabilité s’exercent dans toute leur simplicité et leur rigueur chez les êtres simples. En effet, toutes les fois qu’il s’agit d’êtres simples, ou qui, à nos moyens d’optique, paraissent simples — ce qui ne prouve pas encore rigoureusement leur simplicité, — comme les bactéries par exemple, l’irritabilité chimique paraît être la seule loi du mouvement. Qu’est-ce donc que les mouvements de ces bactéries si merveilleusement étudiées par M. Engelmann, sinon une affinité pour l’oxygène, c’est-à-dire en somme le phénomène chimique le plus simple et le plus général qui existe dans la nature ?

Ainsi la critique faite par M. Binet ne subsiste pas. Au contraire, il semble bien prouvé que des organismes complexes, et très complexes, uni ou pluri-cellulaires, ont une psychologie compliquée en rapport avec la différenciation de leurs organes, tandis que les êtres simples et ils ne sont simples que s’ils sont homogènes — ont une psychologie simple qui probablement n’est représentée que par les lois de l’irritabilité.

Ch. Richet.

Réponse à M. Ch. Richet.

Il existe entre M. Richet et moi un dissentiment profond. M. Richet a écrit, dans son Essai de psychologie générale, les lignes suivantes : « Il est des êtres simples qui semblent n’être qu’un assemblage homo-