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RICHET.les réflexes psychiques

Si donc nous appelons conscients les seuls phénomènes qui s’accompagnent d’une notion claire du moi, et de mémoire, il est clair qu’il peut y avoir des réflexes avec connaissance et sans conscience.

Autrement dit il peut y avoir une appréciation rapide, instantanée, de la qualité de l’excitation, sans que cependant cette excitation ait retenti dans la conscience principale. Il y a eu sans doute, à un moment donné, pendant un intervalle de temps minime, une connaissance, et par suite une conscience de la qualité de l’excitant ; mais l’impression reçue a été très faible ; le souvenir en a disparu, et la conscience principale, avec personnalité plus ou moins durable, n’en a pas été ébranlée.

Inversement il peut y avoir claire et durable conscience d’une excitation sans aucune connaissance de la qualité de l’excitation.

La conscience de l’excitation suppose que le moi a perçu une excitation quelconque. La connaissance indique quelque chose de plus. Outre l’ébranlement de l’excitation, le moi, dans le cas de connaissance que nous supposons ici, a distingué tant bien que mal la nature même de cette excitation. Il la compare à d’autres excitations analogues, la juge, l’apprécie, en un mot il l’élabore, et la soumet à un travail intellectuel plus ou moins rudimentaire de comparaison, d’estimation, de souvenir.

En un mot la conscience de l’excitation est un phénomène purement subjectif, tandis que la connaissance de l’excitation indique une objectivation quelconque.

Prenons un exemple : car, en un sujet aussi délicat, on ne peut se faire comprendre qu’à force d’exemples.

Quand un corps étranger introduit dans l’œil produit le clignement réflexe, il y a clignement réflexe conscient ; mais la connaissance que nous pouvons avoir de ce corps étranger n’influe en rien sur le clignement. Que ce soit du fer, du charbon, du sable ou une mouche, le clignement est le même ; il n’est en rapport qu’avec l’intensité de l’offense faite à la conjonctive. C’est la quantité, et non la qualité de l’excitation, qui produit le réflexe.

Au contraire, quand un individu nous menace en nous approchant rapidement le doigt ou le poing de la figure, le clignement réflexe est déterminé comme tout à l’heure par une excitation extérieure, mais il implique une certaine connaissance de cette excitation. Ce n’est pas la quantité de la lumière incidente qui produit le clignement, mais la qualité de cette lumière (forme et direction du mouvement).

Dans les deux cas il y a conscience, mais dans le dernier cas seu-