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exige que l’homme conforme sa conduite à la vérité. M. Naville reconnaît cependant que lorsque la philosophie s’est élevée à l’idée du bien, elle ne peut non plus s’y arrêter et doit aboutir à la pratique. Il nous semble qu’il n’a pas fait assez grande la part de la morale et de la religion naturelle dans la philosophie, part très grande, selon nous : les philosophes non spiritualistes semblent lui avoir caché en partie la vue de ce côté de la philosophie, et, d’autre part, les chrétiens philosophes sont portés, lorsqu’ils arrivent à la pratique, à rentrer dans la religion, dont les préceptes sont plus précis.

Nous arrivons maintenant à la partie la plus originale de l’œuvre de M. Naville, celle qui traite de l’accord de la philosophie et de la religion. Prenant dans le dogme les réponses aux questions éternelles de la pensée, il traite ces réponses comme des hypothèses proposées à la science. « Traitons, dit-il, ces affirmations par la méthode scientifique ; déduisons-en les conséquences et comparons ces conséquences avec les faits à expliquer. Si cette épreuve tourne à l’avantage du dogme, celui-ci deviendra, au point de vue scientifique, une hypothèse confirmée. On voit que cette solution des rapports de la philosophie et de la religion est fournie par les principes de méthode posés dans la Logique de l’hypothèse. Du moment qu’on a reconnu la nécessité des hypothèses dans les recherches scientifiques, on est amené tout naturellement à concevoir ce mode d’influence de la religion sur la philosophie.

G. Lechalas.

Dr Alfred baron von Berger. — Raumanschauung und formale logik. (Intuition de l’espace et logique formelle). Wien, K. Konegen, 1886, gr. in-8o de 48 pages.

Le but que M. de Berger se propose n’est pas d’énoncer des vues nouvelles eu égard à la logique formelle ; mais il veut réfuter la doctrine de Fr. Albert Lange, exposée dans les « Études de logique » (Contribution à la reconstitution, sur de nouvelles bases, de la logique formelle et de la théorie de la connaissance ; Iserlohn, 1877).

Selon Lange, notre assurance en la nécessité et en la généralisation des règles de la logique formelle, et par conséquent en leur apriorité, ne se fonde pas sur la loi de la contradiction, mais sur l’intuition des images d’espace. En d’autres termes, les règles de la logique formelle ne sont pas des jugements analytiques, mais elles sont, comme les propositions mathématiques, des jugements synthétiques a priori.

Si Lange dit que tous les jugements, parce qu’ils sont fondés sur l’intuition, sont des jugements synthétiques, c’est qu’il a méconnu le sens attaché par Kant à la distinction entre les jugements analytiques et les jugements synthétiques. Il est vrai que les notions sont une espèce de représentation due à l’intuition ; mais, pour Kant, il ne s’agit pas du caractère psychologique des jugements ; ce qui importe, c’est la relation du sujet au prédicat.