Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXV, 1888.djvu/45

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
35
PAULHAN.l’associationnisme et la synthèse psychique

telles que quand nous les formulons, mais elles existent dans les faits concrets. Du moment que des éléments existent et forment un composé, le rapport de ces éléments est aussi réel que l’existence du fait composé qui consiste dans l’existence de ce rapport. Un fait en somme est une loi d’autres faits. L’existence d’une locomotive est la loi même selon laquelle sont assemblées les parties de la locomotive ; supprimez l’arrangement, la machine n’existe plus, il n’en existe que les éléments ; prenez un de ces éléments, une roue, par exemple, la disposition de cette roue est le fait même de son existence ; brisez-la, il n’y a plus de roue, il n’y en a que les morceaux et ainsi de suite chaque chose plus ou moins complexe étant le résultat des rapports des parties et ne subsistant que par la réalité de ce rapport.

Les rapports du fait et de la loi exigeraient plus de développements et nous conduiraient facilement à aborder le problème de la connaissance. Je m’abstiendrai ici de m’engager dans cette voie ; je me borne à indiquer que les rapports sont réels au même titre que les phénomènes et que les faits, c’est-à-dire que tout ce que nous pouvons imaginer de réel. C’est tout ce dont nous avons besoin pour l’examen des lois de l’esprit et la critique des théories empiriques.

La théorie associationniste a pour but de montrer que tous les actes de l’esprit se ramènent à des associations par contiguïté et ressemblance de sensation, de sentiment, d’images, etc. J’ai déjà indiqué l’équivoque du mot « se ramener ». Il y a peut-être dans l’esprit des phénomènes et des associations par contiguïté et ressemblance, mais on ne ramène jamais un fait à un autre fait, une loi à une autre loi ; on peut seulement découvrir un rapport entre les deux ; croire que l’esprit se ramène à des associations au sens de l’école anglaise, c’est donc croire qu’il n’y a pas autre chose dans l’esprit que de telles associations, et que ce sont là les seuls principes directeurs de l’esprit. Nous croyons pouvoir établir au contraire que les lois de l’association ne sont que des lois secondaires, et qui sont elles-mêmes soumises à une loi supérieure qui détermine leur mode d’action et les diverses combinaisons qui s’effectuent conformément à elles.

Ce principe, c’est la physiologie qui nous le donne. Il est généralement admis maintenant que l’acte réflexe est le type de notre vie psycho-organique. Or tout réflexe, même relativement simple, à plus forte raison encore tout acte instinctif ou rationnel consiste essentiellement dans une systématisation d’impressions, de souvenirs plus ou moins organisés et complexes (idées, sentiments, habitudes, structure acquise des nerfs et des centres nerveux) et d’actes. Divers phénomènes s’unissent ainsi et se synthétisent harmoniquement avec