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société de psychologie physiologique

vrai que, d’une façon générale, la justesse des vues de Gratiolet sur ce point se trouve confirmée par toutes les recherches anatomo-physiologiques faites depuis trente ans. De même que l’accroissement du poids cérébral, la modification morphologique consistant dans le passage du type pariétal au type frontal est évidemment en rapport avec un perfectionnement psychologique. On est donc obligé d’admettre que, sous le rapport de la forme générale du cerveau comme sous le rapport du volume cérébral, Gambetta était inférieur à Bertillon.

Mais à quelle sorte d’infériorité psychique correspondait cette infériorité anatomique de Gambetta ? C’est là une autre question que je n’espère point résoudre, mais qui peut néanmoins être examinée ici.

En ce qui concerne le grand volume absolu et relatif du cervelet chez Gambetta comparé à Bertillor, on ne peut rattacher ce caractère physiologiquement qu’à une différence dans la motricité. Gambetta était d’une stature supérieure à celle de Bertillon et il est possible que ce soit là l’unique cause de son excès de développement cérébelleux. En vertu de la fonction coordinatrice des mouvements qui est attribuée au cervelet par la généralité des physiologistes, on pourrait songer à une différence dans l’adresse des mouvements ; mais il paraît que Bertillon était adroit dans ses mouvements en même temps que d’une vigueur normale, eu égard à sa petite taille.

La stature peut encore entrer en question à propos de l’excès du lobe temporal chez Gambetta. Mais elle ne saurait entrer en ligne de compte dans l’interprétation des deux autres caractères cérébraux qu’il nous reste à examiner, à savoir la supériorité absolue et relative du lobe frontal chez Bertillon, puisque cette supériorité coïncide avec une infériorité de taille. Cependant si l’on considère chacun des deux cas en particulier, la considération de la stature peut entrer en jeu, car, toutes choses égales d’ailleurs, une forte stature comporte un crâne du type pariétal, tandis qu’une faible stature comporte un crâne du type frontal[1]. Cela résulte, selon moi, de ce que la taille influe davantage sur le développement de la région moyenne du cerveau que sur sa région antérieure, mais je ne puis insister en ce moment sur cette question. J’ajouterai seulement que le type pariétal du crâne a été noté comme très fréquent chez les assassins, caractère que le Dr Bordier a interprété par cette formule : « Moins de réflexion et plus d’action », formule assez bien justifiée par les données de la physiologie expérimentale et de l’anatomie comparative. J’examinerai tout à l’heure si elle doit être appliquée au cas de Gambetta. Il reste à se demander d’abord comment, parmi les deux hommes illustres dont il s’agit, le plus petit pouvait posséder le cerveau le plus volumineux d’une façon absolue quant aux régions occipitale, pariétale et surtout frontale. La supé-

  1. L. Manouvrier, Grandeur du front et des principales régions du crane dans les deux sexes et dans diverses races. (Assoc. franç. p. l’av. des sciences, 1882.) — Modifications du profil encéphalique et endocranien dans le passage de l’enfance à l’âge adulte. (Bull. de la Soc. d’anthropologie de Bordeaux, 1884.)