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4o Si 1-n points d’un système sont fixés, il repassera par la position initiale.

5o L’espace a trois dimensions.

6o L’espace est illimité.

Les deux derniers postulats caractériseront l’espace euclidien parmi tous les espaces définis par l’ensemble des quatre autres.

Laissons de côté la question de la réalité ou même de la possibilité objective d’espaces à n dimensions ; les travaux de Riemann et d’Helmholtz ont une signification purement logique. Mais ils semblent empiéter sur le terrain de la métaphysique en aboutissant à une définition de l’idée d’espace, et ruiner la thèse de l’idéalisme kantien en présentant cette idée comme un assemblage d’éléments où rien n’apparaît comme nécessaire, ni les éléments eux-mêmes, ni leur mode d’association.

Examinons pourtant de plus près cette définition. Pourrions-nous, à la simple énumération des postulats qui la composent, et sur la foi d’une notion que nous possédons tous, déclarer qu’ils traduisent fidèlement l’idée d’espace ? II ne saurait être question d’un pareil résultat. Le problème est exclusivement scientifique. Riemann et Helmholtz ont voulu donner une définition de l’espace à l’usage de la science, et plus particulièrement de l’analyse mathématique. C’est un problème qui, par sa nature même, est loin d’admettre une solution unique, et qui, en tout cas, reste étranger aux questions métaphysiques sur l’essence et sur le mode de formation dans notre esprit de l’idée d’espace. — D’une manière générale, la définition dans les sciences est le procédé par lequel elles s’assimilent constamment des idées nouvelles, en y substituant des ensembles de propriétés traduisibles dans leur langage. En particulier, quand il s’agit d’une notion fondamentale qui sert de base à une science déjà fort avancée, la question présente un caractère spécial. Définir cette notion, c’est trouver un certain nombre de propositions, qui, posées en principes, aient comme conséquence le développement que l’on connaît déjà. On sent toute l’indétermination d’un pareil problème : il suffira, pour qu’une définition soit acceptable, que la chaine de ses conséquences vienne se confondre, après un nombre quelconque d’anneaux, avec celle qui constitue la science elle-même. Si l’ensemble des postulats proposés par Riemann et Helmholtz fournit une solution de ce problème, il sera seulement établi qu’en géométrie ou en mécanique tout se passe comme si on eût pris ces postulats pour point de départ ; un mode de groupement curieux d’éléments empruntés à la perception aura réalisé un échafaudage qui pourra logiquement se substituer à l’idée d’espace au début de