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de la science des religions ; dans la seconde, dite « phénoménologique », il expose avec un certain développement les objets de l’adoration. Il n’est pas besoin de définir ce dont traitent les chapitres consacrés à l’ethnographie. Enfin, voici l’ordre suivant lequel sont abordées les différentes religions : Chinois, Egyptiens, Babyloniens-Assyriens, Hindous. Dans un second volume, l’auteur traitera des religions des Perses, des Grecs, des Romains, des Germains et de l’Islamisme. On voit qu’il écarte de son cadre la religion juive et la religion chrétienne, lesquelles seront traitées plus amplement dans des volumes spéciaux, par d’autres collaborateurs de la Collection des manuels théologiques.

Nous louons le savant hollandais, d’abord de n’avoir pas encombré son programme du fatras des petites religions. Nous avons soutenu que l’historien des religions devait se vouer essentiellement à l’étude des grandes religions historiques, sérieusement documentées ; c’est bien aussi le sentiment de l’auteur du présent manuel. En second lieu, l’ordre adopté pour l’étude est un ordre à la fois géographique et historique ; c’est celui même que nous recommandions, à l’encontre des auteurs qui prétendent retracer l’évolution de l’idée religieuse dans ses différentes phases et, avant de nous renseigner sur ce qu’on connaît, commencent par nous exposer doctement un prétendu état primitif, de prétendues origines, que l’on ne connaît pas. Nous n’aurions donc que des éloges à adresser au plan général adopté par M. Chantepie, si nous ne trouvions absolument hors de propos ses deux chapitres de phénoménologie » et d’ « ethnographie », qui remplissent à eux seuls et sans aucune utilité le bon tiers du présent volume. L’auteur pouvait en vingt-cinq pages nous dire très nettement ses prémisses ; il en a employé deux cent trente à cet objet et s’est vu dans l’obligation de renvoyer à un second volume ce qui aurait parfaitement rentré en un seul. Cette longue et pesante introduction contient elle-même des éléments de valeur fort inégale. On nous donne une intéressante classification des religions due à M. le professeur Tiele, ce qui est un utile renseignement, mais on nous met en même temps sous les yeux, et sans aucune nécessité, le classement proposé par Hegel, qui est vieilli, et celui préconisé par Hartmann, qui est un monument de la plus singulière fantaisie et ne mérite en aucune façon l’honneur d’être servi aux étudiants.

Les défectuosités du plan ici adopté sont compensées par de solides qualités. M. Chantepie ne s’élève pas à une grande hauteur, mais ses vues sont généralement saines et justes : ce mérite est particulièrement appréciable dans un Manuel. Nous avons déjà indiqué avec éloge qu’il se montre remarquablement réservé dans les questions qui touchnt aux origines. En consultant plus spécialement ce qui concerne la partie la plus ancienne de la religion hindoue et les chapitres consacrés aux commencements de la religion assyro-babylonienne, nous avons constaté un silence de bon augure sur les fantaisies dont on nous a fatigués il y a quelques années ; sur ces deux points, M. Chantepie évite de se lancer dans de fallacieux développements et, en ce faisant, il rend aux