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PAULHAN.l’associationnisme et la synthèse psychique

sagé comme un appareil qui reçoit des impressions du dehors, les emmagasine, les dissocie, en recombine les éléments et réagit par des actes. Il faut par conséquent qu’il existe chez l’homme une coordination, une systématisation des éléments psychiques, systématisation qui d’ailleurs est loin d’être parfaite. Cette organisation psychique a sa cause et son fondement dans l’organisation physiologique. L’associationnisme néglige les lois générales de la physiologie et de la psychologie. L’esprit n’est pas plus composé d’images et de perceptions unies par des lois de contiguïté et de ressemblance que l’organisme physiologique ne pourrait se définir par la mise en activité des éléments semblables et contigus. Au point de vue de la synthèse générale, l’associationnisme ne peut être défendu, il n’explique pas plus l’esprit que le corps. Au point de vue de l’analyse, il ne paraît pas mieux fondé. Dans les opérations supérieures de l’esprit nous voyons non seulement que la contiguïté et la ressemblance sont entièrement subordonnées à la systématisation, mais encore que ni la ressemblance ni la contiguïté ne paraissent avoir d’influence, propre que l’association par ressemblance et par contiguïté ne sont que des associations de divers systèmes psychiques se succédant autour d’un système secondaire qui fait partie des autres. La preuve en est que quand la systématisation manque, l’association disparaît. Dans les actes inférieurs de l’esprit, la coordination des éléments psychiques est moins évidente à première vue. Cela est déjà une raison de croire que cette coordination est une loi propre très importante et caractéristique de l’esprit. Mais nous voyons que si la coordination manque entre les divers éléments, ces éléments sont à leur tour des systèmes coordonnés soumis à la loi générale de l’esprit. Et les associations qui peuvent s’établir entre eux étant causées comme précédemment par une partie permanente qui est commune à plusieurs d’entre eux, comme élément de divers systèmes, nous retrouvons le cas précédent et l’association par similarité et contiguïté disparaît encore pour faire place à l’association par système[1].

Au point de vue statique, les mêmes conclusions nous ont paru justifiées. Partout et toujours dans l’esprit, nous trouvons une loi de coordination, de systématisation, qui se manifeste à divers degrés de perfection, mais qui est essentielle à un degré, si faible qu’il soit, pour qu’une action mentale se produise et pour qu’un esprit se con-

  1. Les termes d’association par contiguïté ou similarité peuvent être cependant utiles dans la langue de la psychologie comme termes abréviatifs pour désigner simplement certaines classes d’associations systématiques, dont elles caractériseraient la forme apparente et non la cause réelle.