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REVUE POUR LES FRANÇAIS

étages et à escaliers extérieurs qui se répandirent en Chine sous la dynastie des Tcheou, onze siècles avant J.-C. et qui rappellent de la façon la plus saisissante les monuments de la civilisation chaldéo-assyrienne. D’ailleurs les rapports de l’astronomie chinoise avec l’astronomie chaldéenne montrent que cette dernière a été certainement la mère de l’autre. Des contacts non seulement religieux mais commerciaux ont été établis du premier au septième siècle après J.-C. entre la Chine, d’une part, l’Inde, l’empire romain et les pays arabes, d’autre part.

Ainsi le principe de stagnation par lequel on prétend à tout instant expliquer la Chine et les choses chinoises n’est pas conforme à la vérité. En ce qui concerne l’art et ses formes variées, il est du reste très certain que des évolutions assez considérables se font remarquer d’une période à une autre, mais on peut les caractériser en disant qu’elles ne vont jamais au bout d’elles-mêmes. Il semble que ceux qui les ont conduites se soient arrêtés intimidés devant leur propre audace et, qu’incertains s’ils étaient dans la bonne route, ils aient préféré souvent rétrograder pour retrouver l’ancienne route. De plus, il est dans le tempérament de l’artiste chinois de chercher à interpréter la nature par des formules bien plus qu’à la reproduire par des moyens sentis. Il a le sentiment de la nécessité absolue de certaines conventions ; on sent que, s’il venait à délaisser le convenu habituel, ce serait pour en établir un nouveau ; il est incapable d’émancipation.

Nous parlions tout à l’heure d’architecture. En cette matière, la manie de réglementation de certains empereurs vint à la rescousse. Youg-Tching, par exemple, s’est signalé par la publication d’un traité d’architecture en cinquante volumes dans lesquels sont fixés les rapports proportionnels obligatoires entre telles et telles parties d’un édifice, monument public ou maison particulière. Ces dernières, du reste, si la loi était toujours appliquée, devraient indiquer par leur seule apparence extérieure, le rang du propriétaire. Toute fantaisie était interdite. Les empereurs s’en réservaient toujours le monopole pour eux-mêmes ; les taï ne s’élevaient que dans leurs palais et les princes mêmes se virent interdire, au seul profit du souverain, d’en construire dans les leurs.

Les Chinois ont toujours connu la voûte mais ils n’ont jamais pratiqué la coupole. Du reste la voûte elle-même paraît leur déplaire. Ils n’en ont fait usage que pour jeter sur les petits cours d’eau ces ponts aux courbes élégantes dont le tablier, dressé en