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L’ÎLE DE CRÈTE

revenus. La Porte qui ne s’était pas émue des crimes fut touchée de ce déboire. Elle envoya en Crète un gouverneur énergique, Hadji Osman Pacha, chargé de remettre à la raison les beys Crétois. Il ne trouva rien de mieux que de fournir aux chrétiens eux-mêmes les moyens de se défendre et même de se venger. Exaspérés par de longues années de souffrance, ceux-ci en usèrent avec rage et férocité. Des flots de sang musulman coulèrent, jusqu’au jour où la disgrâce du gouverneur remit le pouvoir entre les mains des beys qui en abusèrent de nouveau jusqu’au soulèvement général de 1821, signal de la guerre de l’indépendance hellénique. Ce soulèvement dura neuf ans, au cours desquels la Crète fut le théâtre d’épisodes sanglants, à la fois grandioses et sauvages, dont quelques-uns, qu’on eût dit évoqués de la guerre de Troie, furent inspirés d’un héroïsme antique. Tout cela en vain pour les chrétiens puisqu’en 1830 les traités consacrant l’indépendance du royaume de Grèce restituèrent l’île de Crète à l’empire ottoman.

Depuis cette époque les Grecs Crétois sont restés presque constamment en posture d’insurrection. Les soulèvements de 1858, 1866, 1889, 1896 et 1905 en sont la preuve. À présent qu’ils ont l’avantage sur leurs ennemis et sont tirés du joug des Turcs, ils ne se déclarent pas satisfaits et réclament avec insistance l’annexion de leur île à la Grèce. Ils l’obtiendront assurément dans un prochain avenir et nul ne contestera qu’ils aient bien mérité de leur patrie.

L’histoire si troublée de la Crète n’a pas naturellement favorisé son développement économique. Ses populations, occupées à des luttes incessantes, ont longtemps délaissé leurs travaux.

Les principales richesses de l’île sont agricoles : en première ligne les plantations : olivier, oranger, vigne, citronnier, etc… ; puis les cultures : céréales, coton, cochenillier, mûrier, etc… ; enfin l’élevage : moutons, chèvres, bétail, chevaux.

La pêche des éponges, sur la côte est, occupait jadis beaucoup de monde, procurant à ses exploitants de gros profits. L’industrie locale consiste en manufactures de savon, tanneries, fromageries, exploitations séricicoles et préparation d’un excellent vin connu sous le nom de malvoisie de Candie. Le commerce extérieur de la Crète a dépassé 24 millions de drachmes en 1904, ce qui est