Page:Ribot - Les Maladies de la volonté.djvu/138

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

leptique, somnambulique, etc. Ces distinctions n’importent pas ici, l’état mental restant au fond le même. La plupart des extatiques atteignent cet état naturellement, par un effet de leur constitution. D’autres secondent la nature par des procédés artificiels. La littérature religieuse et philosophique de l’Orient, de l’Inde en particulier, abonde en documents dont on a pu extraire une sorte de manuel opératoire pour parvenir à l’extase. Se tenir immobile, regarder fixement le ciel, ou un objet lumineux, ou le bout du nez, ou son nombril (comme les moines du Mont-Athos appelés omphalopsyches), répéter continuellement le monosyllabe Oum (Brahm), en se représentant l’être suprême ; « retenir son haleine », c’est-à-dire ralentir sa respiration ; « ne s’inquiéter ni du temps ni du lieu » : tels sont les moyens qui « font ressembler à la lumière paisible d’une lampe placée en un lieu où le vent ne souffle pas[1] ».

  1. Bhagavad-Gita, lecture 6e. — Les docteurs bouddhistes admettent quatre degrés dans la contemplation qui conduit au nirvâna terrestre.
    Le premier degré est le sentiment intime de bonheur qui naît dans l’âme de l’ascète quand il se dit enfin arrivé à distinguer la nature des choses. Le yogui est alors détaché de tout désir autre que le nirvâna ; il juge et raisonne encore ; mais il est affranchi de toutes les conditions du péché et du vice.
    Au second degré, le vice et le péché ne le souillent plus, mais en outre il a mis de côté le jugement et le raisonnement ; son intelligence ne se fixe que sur le nirvâna, ne ressent que le