Page:Ribot - Les Maladies de la volonté.djvu/140

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noyau à un groupe unique qui occupe toute la conscience et s’y maintient avec une extrême intensité. Plusieurs mystiques ont décrit cet état avec une grande délicatesse, avant tous sainte Thérèse. J’extrais donc quelques passages de son autobiographie, pour mettre sous les yeux du lecteur une description authentique de l’extase.

Pour s’unir à Dieu, il y a quatre degrés « d’oraison », qu’elle compare à quatre manières de plus en plus faciles d’arroser un jardin, « la première en tirant de l’eau du puits à force de bras, et c’est là un rude travail ; la seconde en la tirant avec une noria (machine hydraulique), et l’on obtient ainsi avec une moindre fatigue une plus grande quantité d’eau ; la troisième en faisant venir l’eau d’une rivière ou d’un ruisseau ; la quatrième et sans comparaison la meilleure, c’est une pluie abondante. Dieu lui-même se chargeant d’arroser, sans la moindre fatigue de notre part » (ch. XI).

Aux deux premiers degrés, il n’y a encore que des essais d’extase que la sainte note en passant : « Quelquefois, au milieu d’une lecture, j’étais tout à coup saisie du sentiment de la présence de Dieu. Il m’était absolument impossible de douter qu’il ne fût au-dedans de moi ou que je fusse abîmée toute en lui. Ce n’était pas là une vision… Elle suspend l’âme de telle sorte qu’elle