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serve quand un homme qui a perdu la vue peut peindre des objets visibles. Le cerveau est maintenant capable d’agir indépendamment de l’excitation extérieure, ayant acquis une disposition à agir ainsi par des exercices antérieurs sous une excitation extérieure.

2o En second lieu, nous devons admettre que les différentes parties du cerveau qui s’exercent en même temps acquièrent d’une manière quelconque une disposition à agir conjointement. M. Herbert Spencer a exprimé ce fait en disant que « des lignes de très faible résistance se forment graduellement pour l’action nerveuse par le passage répété de l’énergie nerveuse dans certaines directions définies. »

Cette esquisse rapide du développement cérébral peut suffire peur indiquer un certain parallélisme entre les processus du développement psychique et physique. Il y a une complexité de plus en plus grande dans la structure cérébrale et dans l’action qui correspond à la complexité toujours plus grande de la vie mentale, et il y a de bonnes raisons pour supposer que les structures qui arrivent tard à leur développement, sont dans une relation intime avec les activités supérieures et tardives de l’intelligence (penser, délibérer, etc.). On ne sait jusqu’où ce parallélisme s’étend. Par exemple, il n’est pas certain jusqu’à présent qu’on puisse trouver une contrepartie physiologique ou un équivalent de ce que nous appelons l’association. Quoi qu’il en soit, il faut se garder de pousser ce parallélisme jusqu’à le présenter comme une explication finale des produits psychiques. Ainsi, d’une simple considération de la différenciation progressive de la substance nerveuse du cerveau, on ne pourrait pas déduire les lois du développement de l’activité intellectuelle, la distinction des impressions, etc.

M. Spencer pousse jusqu’à l’extrême l’identification des processus psychiques et physiques, en les donnant les uns et les autres comme le résultat de différenciations et d’intégrations continues. Mais, puisque l’intégration psychique semble désigner l’assimilation ou la classification, il n’est guère facile de reconnaître une identité ou une équivalence réelle entre le processus physiologique et le processus mental désignés ici par le même mot.

Développement mental considéré comme adaptation au milieu. Jusqu’ici, nous avons considéré le développement d’une intelligence individuelle comme un processus isolé, n’ayant aucun rapport avec ce qui est en dehors de lui, excepté les changements nerveux concomitants. Mais ce double processus de développement psychique et nerveux peut être considéré aussi dans ses rapports avec certains