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qué le poids de sa tête est considérable : et elle est en effet relativement beaucoup plus volumineuse que chez l’adulte[1].

« Tous les animaux dorment, les Poissons, les Mollusques (= Céphalopodes), même les animaux qui ont les yeux durs, comme les Insectes ; seulement ils dorment fort peu, ce qui a pu faire douter qu’ils aient cette faculté. Quant aux Testacés (= Mollusques gastéropodes et lamellibranches), il est difficile de se prononcer. »

On peut signaler à propos du sommeil un passage où Aristote montre très bien comment les moindres excitations extérieures se produisant sur l’homme endormi, prennent dans le rêve des proportions énormes : le plus petit bruit devient un tonnerre ; on croit traverser des brasiers, parce qu’on a quelque légère cuisson à la peau, etc. (Divination, I, § 7.)

Les deux poumons pour Aristote ne forment qu’un organe, un tout (Des parties, III, 6, 7), tels que nous les voyons suspendus à l’étal des tripiers au bout de la trachée-artère[2]. Dans l’Extrême-Orient encore aujourd’hui on fait la même confusion : la petite encyclopédie japonaise que nous avons sous les yeux[3], figure les deux poumons comme un organe unique à six lobes, à l’extrémité d’une trachée qui va en s’élargissant vers le bas, mais ne se divise point. L’échancrure médiane qui sépare les trois lobes de gauche des trois lobes de droite est seulement un peu plus accusée que les autres. Aristote ne fait exception que pour les Ovipares quadrupèdes et les Serpents chez lesquels, dit-il, le poumon est membraneux et semble double (Des parties, III, 7). Le poumon a pour fonction de refroidir le sang par le contact de l’air ; chez les Poissons, qui ne respirent pas, ce refroidissement est accompli par l’eau dans les ouïes. Le poumon a en lui-même le pouvoir de se dilater et de se rétracter, c’est lui par conséquent qui pousse et soulève les parois de la poitrine. Quand il se dilate, l’air s’y précipite, quand il se rétracte

  1. Nous lisons encore dans le traité De la Veille et du Sommeil « qu’après le repas l’humide (nous dirions aujourd’hui « les vapeurs » ) porté en haut alourdit l’encéphale, puis redescendant chasse la chaleur et cause ainsi le sommeil (Sommeil, III, § 5). Les enfants dorment beaucoup par l’abondance des vapeurs qui s’élèvent ainsi vers la tête, puis redescendant gonflent les veines et rétrécissent le larynx, d’où l’épilepsie, qui prend souvent pendant le sommeil (Sommeil, II, § 6) ». IL est assez difficile de saisir le lien de toute cette doctrine qui semble même assez différente de celle du maître.
  2. Il semble qu’au temps d’Aristote, certaines personnes sinon les physiologues croyaient que des deux conduits du cou l’un sert aux aliments solides, et que par l’autre les boissons vont directement à la vessie. Aristote n’a pas de peine à montrer la fausseté de cette opinion en rappelant que les matières vomies sont colorées par le vin.
  3. Voy. ci-dessus, tome XVIII, p. 369, note 2.