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reproduction sur le fond de la ressemblance se comprend mieux ; elle est d’extrême importance. On peut distinguer la reproduction, soit du même, soit d’une partie du non-même liée au même (la contemporanéité étant mise en parallèle avec cette seconde forme). Cette reproduction est l’instrument du pouvoir imaginatif. C’est encore à la reproduction du semblable par le moyen d’un » qui y a rapport que nous devons les notions d’espèce, de genre, etc. M. Lipps traite ensuite des différences individuelles du pouvoir reproductif (chap.  VI.) Je passe et je viens au fait des stimulations ou érections inconscientes.

Les représentations reproduisent des représentations, et le temps s’écoule. Il y a là un procès dont la conscience ne nous apprend rien. Ce n’est pourtant pas a tout prêt qui produit b tout prêt, et celui-ci c ; mais a commence un procès dont le résultat est b, et b un procès dont le résultat est c, etc. Et ce procès est continu ; mais les éléments de la continuité restent en dehors de la conscience. Ces éléments n’en appartiennent pas moins au même cours d’évènements que la sensation et la représentation, et les préliminaires inconscients sont donc psychiques.

Le procès inconscient n’aboutit pas toujours à la conscience. Ainsi d soldat qui ne sent pas sa blessure ; quoique l’âme ait été mise en érection, l’excitation en ce cas n’a pas produit la conscience. Ces érections inconscientes sont la matière sur laquelle s’exerce l’attention. Lorsque j’écoute un récit, si mon attention demeure active, cela suppose que les mots du récit, non seulement ont frappé mon oreille, mais ont stimulé mon âme. L’attention n’agit pas directement sur les nerfs ; elle relève l’énergie des stimulations. Si la force de l’attention faisait seule la force de la sensation, l’énergie de la conscience serait identique à celle de l’excitation, ce qui n’est point ; au contraire, l’attention prête une plus grande valeur au faible son d’une cloche qui frappe à peine notre oreille. L’attention, du reste, n’a pas plus le pouvoir d’exercer un arrêt sur les voies conductrices de l’excitation que de les soutenir directement.

On a distingué l’attention passive de l’attention active. La différence entre les deux n’est pas essentielle, Les premiers mots d’un récit me font attentif (état passif), et je m’efforce d’en entendre la suite (état actif}. Dans l’un et l’autre état, l’attention s’applique à des éléments qui sont déjà chose psychique. D’une part, un nom connu prononcé en une conversation arrive à mon âme, parce qu’il y trouve des dispositions à le représenter ; et, d’autre part, si je suis attentif à la plus faible coloration qui apparaît en une expérience, c’est que j’ai la représentation préalable de cette coloration. Seulement, dans le premier cas, les éléments qui provoquent la conscience sont donnés dans la stimulation même, et, dans le second cas, ils existent tout préparés.

Les états inconscients possèdent une aptitude à en provoquer d’autres. On en a un exemple dans la marche, où le passage d’une position du corps à une autre se fait par un intermédiaire psychique, à la suite