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ANALYSES.theodor lipps. Grundtatsachen des Seelenlebens.

d’un exercice qui était la répétition d’une suite consciente et qui a permis de la réaliser inconsciemment. Le meunier n’entend pas le bruit de la roue de son moulin, et il entend, au contraire, que ce bruit s’arrête. Qu’on ne parle pas, ici encore, d’une excitation qui ne serait pas représentée. L’explication du fait qu’un bruit habituel ne nous frappe plus est plutôt à chercher dans cette facilité que possède l’état érectif à se reproduire et à s’anéantir à mesure dans sa reproduction ; la cessation du bruit interrompt ce travail psychique, et le meunier est frappé de ne plus entendre la roue de son moulin, parce qu’il s’en trouve troublé dans le tranquille tissage du cours de pensée où il était.

« L’importance de l’aptitude reproductive des stimulations inconscientes reproductives est si grande qu’on ne conçoit pas ce qui resterait, sans elle, de notre pensée. » Dans le sommeil comme dans la veille, toutes les excitations possibles, trop faibles en elles-mêmes pour arriver et s’attacher à la conscience, exercent néanmoins une action reproductive sur le cours de la vie de représentation (chap.  VII).

Si maintenant on compare l’énergie de l’excitation au mouvement d’une pierre jetée en l’air, qui perd à mesure de sa vitesse par la résistance du milieu, on pourra marquer sans difficulté la place de l’inconscient. Il arrive, en effet, que l’excitation commence à décroître avant que d’être entrée dans la conscience ; ou bien elle y pénètre et s’y conserve selon la quantité d’énergie qu’elle possède encore, durant un temps plus ou moins long. La question est de s’enquérir des conditions qui font qu’elle se comporte de l’une ou de l’autre manière, c’est-à-dire des circonstances desquelles dépend son énergie (chap.  VIII).

III. Le cours de la représentation et les rapports statiques de la représentation (Vorstellungsverhältnisse).

Il s’agit ici des rapports d’état de rencontre, et des sources d’où la représentation tire son énergie. Une représentation détourne à son profit la force psychique selon qu’elle est, non pas intense, mais plus intense que les autres représentations. Elle le fait, soit par son énergie propre, soit avec l’aide d’autres représentations. Ce sont deux cas à examiner.

Une question préalable est celle du temps psychologique. M. Lipps contredit la doctrine de Wundt, d’après laquelle le temps de la réaction impliquerait tout ce qui se passe entre la simple excitation sensorielle et le mouvement par lequel elle se termine. Le troisième moment de Wundt, l’aperception (entrée de l’excitation au point lumineux de la conscience), n’appartient pas à ce temps, objecte-t-il. La perception ne marque pas non plus le moment de l’entrée an champ de la conscience, elle est une simple érection psychique, qui Commence, alors qu’elle est encore inconsciente, à décider le mouvement qui se conclut par le geste qui l’enregistre. Le passage de l’impression à la conscience peut avoir lieu, en effet, après l’entier achèvement du mouvement. C’est assez, pour qu’on l’enregistre, que l’impression trouve une disposition psychique favorable. La conscience postérieure et le geste ont