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quelque rapport entre les symboles du tatouage et la nature du délire ; car ce rapport une fois établi pourrait servir le diagnostic. Mais l’auteur a abandonné cette idée a priori. Le tatouage est surtout l’expression d’un caractère régional ; ainsi, dans les provinces très religieuses, ce sont des symboles religieux qui dominent. Lombroso, dans une note fort intéressante ajoutée à cet article, rapporte qu’un jeune homme de vingt ans, atteint de folie morale, porte des tatouages qui sont toute son histoire : on y voit des bottes, un serpent, donna nuda, une tête de Prussien, un porc, une étoile, trois décorations, des inscriptions : mort aux gendarmes ! mort aux femmes ! deux épées dans les mamelles, etc.

Nous relevons encore dans le même numéro un article de Pugliese, sur les nouveaux problèmes de responsabilité pénale. L’auteur examine brièvement les questions soulevées par la suggestion hypnotique, et par la suggestion mentale (Richet), ou la force psychique (Crookes). Plus loin, une curieuse note de Errera, où se trouvent discutées, au point de vue mathématique, les expériences de Richet sur la suggestion mentale (voir Revue philosophique, décembre 1884). L’auteur, en refaisant tous les calculs de Richet, y a rencontré un grand nombre d’erreurs, et les chiffres nouveaux qu’il donne sont presque tous plus favorables à l’hypothèse de la suggestion mentale défendue par Richet.

Lombroso. Le mancinisme et le dextrisme tactile chez les individus sains, les fous, les aveugles et les sourds-muets. — La moyenne normale des individus présente à droite une sensibilité tactile de 1,69, et à gauche, de 1,79. Sur 100 individus, on trouve une égalité du toucher chez 44, le mancinisme (supériorité du côté gauche chez 26, et le dextrisme (supériorité du côté droit) chez 29. En étudiant les criminels, on trouve, à l’inverse, une moyenne de 2,2 à droite et de 2,0 à gauche. La sensibilité est donc plus obtuse à droite qu’à gauche. Sur 100, la parité des deux côtés se trouve chez 54 ; le mancinisme, chez 27 ; le dextrisme, chez 18. Ce qui domine dans ces chiffres, c’est d’abord l’obtusion de la sensibilité tactile (2,2 en moyenne au lieu de 1,69 ; on voit que plus le chiffre est élevé plus la sensibilité est obtuse, car elle se mesure par l’écart des pointes de compas) ; ce qu’il faut remarquer encore, c’est le mancinisme sensoriel qui est fort fréquent. Parmi les fous (104 individus ont été examinés) on trouve le mancinisme chez 43 0/0, le dextrisme chez 32, 6 0/0, l’égalité chez 240/0. À mesure que le mancinisme devient plus fréquent, il se manifeste une plus grande différence entre les deux côtés du corps ; c’est là ce que l’auteur appelle la latéralité, véritable phénomène pathologique qui apporte une contribution intéressante à la question de l’indépendance des deux hémisphères. Chez des aveugles, la moyenne à droite est de 1,70 ; la moyenne à gauche de 1,93 ; la sensibilité tactile des aveugles est donc inférieure à celle des voyants, malgré le préjugé contraire ; on voit aussi que le mancinisme domine chez les aveugles mâles ; c’est le dextrisme chez les femmes aveugles. En somme, la fréquence du latéralisme et du mancinisme rapprochent davantage les aveugles des individus anormaux que des normaux. Les