Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 20.djvu/590

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
586
revue philosophique

de phénomènes psychiques, les tendances, quoique assez fortes, ne peuvent aboutir à l’acte. Ce qui nous autorise à penser que le fait peut se présenter et doit réellement se présenter quelquefois, c’est que nous pouvons constater tous les jours des phénomènes qui semblent indiquer ce manque d’harmonie. Certaines personnes ont une facilité particulière pour exprimer leurs idées ou leurs sentiments, par la parole, par la plume, par les gestes, etc., chez d’autres au contraire, les manifestations extérieures sont presque supprimées, ce n’est pas à dire pour cela que ces dernières ne puissent penser et sentir comme les autres, seulement la tendance organico-psychique ne peut aboutir à l’acte avec la même facilité. De là découlent bien des jugements erronés, portés surtout d’ailleurs par les personnes superficielles.

Nous voyons que le caractère en somme ne consiste absolument ni dans les actes, ni dans les sentiments, ni dans les idées ; le caractère, qui est à peu près la même chose que la personnalité, est un ensemble de tendances groupées et diversement systématisées. Nous voyons aussi que les sentiments tiennent cependant une place importante dans l’organisation du caractère. Nous n’avons pas d’ailleurs à examiner ici à fond l’organisation complète du caractère. Il nous suffit de voir le rôle joué par les phénomènes affectifs qui sont seuls l’objet de cette étude, et cela formera un complément au chapitre précédent, où nous avons surtout étudié l’évolution individuelle des sentiments et des passions. Nous avons déjà vu une partie des relations des phénomènes affectifs avec le caractère en général en considérant les manifestations diverses du caractère et les moyens de l’étudier. Nous aurions à étudier maintenant au point de vue de la synthèse l’action des tendances les unes sur les autres et sur l’organisme en général. Les principes de cette action peuvent se ramener à trois principales :

1o Le principe de l’habitude. Toute tendance, toutes choses égales d’ailleurs, devient plus forte à mesure qu’elle est plus exercée.

2o Le principe de l’association. Toute tendance a pour effet de favoriser et de rendre plus forte ou de faire naître les tendances qui la favorisent à leur tour et peuvent s’harmoniser avec elle.

3o Le principe de la sélection. Toute tendance a pour effet d’affaiblir et de faire disparaître les tendances qui la contrarient et avec lesquelles elle ne peut s’harmoniser.

Il convient de faire quelques remarques sur ces divers principes et d’indiquer quelques réserves.

À un point de vue général, d’abord il est facile de comprendre que