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Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 33.djvu/237

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HYPNOTISME ET CRIMINALITÉ


La doctrine de la suggestion hypnotique, telle que la formule l’École de Nancy, a été soumise, il y a près de huit ans, à l’Académie des sciences morales et politiques, qui lui a fait un accueil fort réservé. Depuis lors, elle a fait son chemin. Ce n’est pas, tant s’en faut, qu’elle ait encore obtenu gain de cause, ni réduit au silence ses contradicteurs. Mais elle a beaucoup fait parler d’elle, tantôt en bien, souvent en mal. Cela n’est pas pour nous affliger. Rien n’est plus funeste aux idées nouvelles que l’indifférence. S’il y a en elles quelque vitalité, elles n’ont qu’à gagner à provoquer la lutte, la contradiction, la raillerie, la colère même. On ne s’attaque qu’à ce qui résiste.

Or, à peine connue, souvent même mal connue, la doctrine de la suggestion a été, elle est en ce moment, elle sera longtemps encore, très attaquée. Comment s’en étonner ? Elle remet tant de choses en question, tant au point de vue philosophique qu’au point de vue social ! Par la lumière qu’elle répand sur la vie inconsciente de l’esprit, dont l’étude avait été trop négligée, elle promet à la psychologie une abondante moisson de faits nouveaux, de découvertes intéressantes : elle lui fournit ce que j’ai appelé, le premier, en 1884, un excellent procédé de vivisection morale et intellectuelle.

Laissant aujourd’hui de côté les autres aspects sous lesquels on peut considérer les diverses et nombreuses applications de la suggestion, je ne veux m’occuper, dans cette étude, que de ses rapports avec la criminalité ; j’y ajouterai seulement quelques observations, qui me paraissent avoir une véritable importance, au point de vue de la défense nationale. Si éloignés, au premier abord, que puissent paraître ces aspects différents d’une même question, j’espère montrer au lecteur qu’ils sont unis par le lien le plus étroit et le moins équivoque.