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Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 33.djvu/40

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LA MALADIE DU PESSIMISME


I

La psychologie pathologique a déjà fait ses preuves, particulièrement dans le domaine des affections nerveuses et mentales. Nous donnera-t-elle un jour, et peut-elle nous donner ce que j’appellerai la psychologie des maladies ? Nous avons lu souvent, dans des ouvrages médicaux, des aperçus touchant les troubles psychiques correspondant à telle ou telle maladie. Mais y a-t-il en réalité, pour chaque maladie ou chaque diathèse morbide, des manifestations psychiques bien tranchées ? S’il en est ainsi, on devrait en faire l’étude systématique et comparative, sans oublier les conditions aggravantes ou atténuantes du tempérament, de l’âge, du sexe, du milieu, de l’éducation, de la profession, du régime. La psychologie des maladies, s’il y a lieu de la constituer, n’intéresserait pas seulement les psychologues et les éducateurs : elle aiderait à préétablir le diagnostic de certaines maladies et à en indiquer l’hygiène prophylactique. Étant donné l’état mental d’une personne, dans ses grandes lignes, on pourrait en inférer qu’elle est sous l’influence de telle ou telle diathèse, ou même sous la menace de telle ou telle maladie spéciale : affections du cœur, du foie, des intestins, des reins, affections nerveuses variées, etc.

Nous n’avons pas qualité pour procéder à des recherches de ce genre : c’est aux médecins psychologues à nous dire si c’est là une psychologie spéciale à ajouter aux autres, et, dans ce cas, c’est à eux à nous la faire. Mais ils devront se garder, plus qu’ils ne le font souvent, des généralisations hâtives. Ils sont trop préoccupés, ce me semble, de montrer aux psychologues purs que leur prétendue science indépendante n’est pas même une science, qu’ils se repaissent d’une viande creuse, vivent de chimères, livrés à leurs propres forces. Leur désir de s’impatroniser dans la place leur fait trop oublier qu’on n’improvise pas dans un champ si vaste, dans un si