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Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 33.djvu/50

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générale encore ignorée, la nutrition générale des arthritiques est profondément viciée. Chez eux, les combustions organiques qui ont pour but de transformer les produits de déchet en matières facilement excrétables se font incomplètement ; c’est ainsi, par exemple, qu’au lieu de transformer une partie de ces matières en urée, produit achevé, et dont l’élimination par les reins se fait sans dommage pour celui-ci, il les transforme seulement en acide urique, c’est-à-dire, en un produit qui correspond à un des stades de formation de l’urée, et qui serait devenu de l’urée, si son oxydation s’était poursuivie ; par conséquent, au lieu de former des sels neutres, l’organisme crée des acides. Ce fait a la plus grande importance, car le passage dans le sang des matières acides équivaut à la présence de produits irritants dont l’action se fait à la longue sentir sur les parois des vaisseaux. Tantôt c’est l’acide urique, comme dans la goutte ; tantôt c’est l’acide lactique, comme dans le rhumatisme ; tantôt encore des produits mal déterminés qui circulent dans l’appareil vasculaire… Comme l’a dit le Dr Pierret, les arthritiques sont des individus qui font de la mauvaise chimie, et qui, de plus, sont soumis à des intoxications secondaires.

« C’est dans la fréquence de ces bouffées congestives vers le cerveau et dans cette auto-intoxication qu’il faut rechercher l’origine des troubles nerveux si fréquents chez les arthritiques ; ces troubles sont plus ou moins accusés chez les malades, ils vont de la simple irritabilité du caractère jusqu’aux maladies nerveuses les plus graves, en passant par la neurasthénie et les névroses[1]. »

Aurons-nous trouvé ici la véritable diathèse, le dessous physique des divers phénomènes compris sous le nom de pessimisme ? Il nous sera peut-être permis de répondre à cette question, quand nous aurons vu comment l’arthritisme agit sur le système nerveux dans ses manifestations psychiques.

« Cette diathèse a été souvent observée chez la plupart des neurasthéniques, et autres névropathes. Les anciens faisaient de l’hypocondrie un des caractères des maladies du foie, et ils l’avaient constatée chez les goutteux et les rhumatisants. Reynols a insisté sur les troubles mentaux et nerveux d’origine goutteuse. Trousseau admettait l’origine rhumatismale de l’hystérie et de l’hypocondrie. Pour Axenfeld, tous les cas d’irritation spinale et de neurasthénie qu’il a observés ou dont il a eu connaissance, sont d’origine rhumatismale ou goutteuse. La neurasthénie serait ainsi une névrose arthritique. Les modifications du caractère chez les herpétiques

  1. Chap. ii, passim.