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Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 33.djvu/539

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ch. dunan. — le probleme de la vie

avec lui paraissent solides, on admettra qu’il faut se contenter de l’assentiment du sens commun là où il existe, et s’en passer là où il n’existe pas et ne peut pas exister.

L’unité métaphysique du monde phénoménal est une condition nécessaire de l’existence de ce monde. Mais le monde phénoménal n’est pas seulement existant en lui-même, il l’est encore par rapport à la conscience d’une infinité d’êtres. Or, pour exister comme objet de conscience, le monde a besoin d’être un, de même que pour exister en lui-même. Est-ce d’une seule forme d’unité, ou de deux formes différentes l’une de l’autre, que dépend l’existence du monde en lui-même et comme objet possible pour une conscience ? Évidemment, c’est de deux formes. En effet, il faut admettre d’abord que la conscience est phénoménale, et qu’elle n’atteint ni les causes, ni les substances, ni rien d’absolu, du moins, si l’on s’en tient, à l’égard des causes et des substances, à la conception que nous nous en sommes faite jusqu’ici. Il faut admettre en outre que l’unité par laquelle la conscience de l’univers phénoménal est rendue possible. est l’unité de ce qui entre, en fait ou en droit, dans cette conscience. Ces deux points accordés, et nous ne pensons pas qu’on puisse les contester, la conséquence est claire : ce n’est pas l’unité métaphysique du monde des phénomènes qui rend ce monde susceptible de devenir objet pour une conscience.

Qu’est-ce donc qui fait que le monde est un par rapport à la conscience, comme il l’est en lui-même ? Nous venons de le dire : c’est que la totalité des phénomènes qui entrent, en fait ou en droit, dans une conscience donnée, a le caractère de l’unité. Or la totalité des phénomènes qui entrent, en fait ou en droit, dans une conscience donnée, c’est l’universalité des phénomènes compris dans le temps et dans l’espace, puisque c’est seulement en tant qu’ils appartiennent au temps et à l’espace que les phénomènes peuvent être objets pour une conscience. Donc, en définitive, ce que la conscience suppose, c’est l’unité du tout que forment les phénomènes qui remplissent le temps et l’espace.

Mais voici une difficulté. Quand on a pris tous les phénomènes répandus à travers le temps et l’espace, il ne reste plus rien, ce semble. On pourra donc juger que ce que nous considérons ici comme la condition de la conscience, c’est précisément cette unité métaphysique du monde phénoménal qui échappe à la conscience, et qui, par suite, n’en peut fonder la possibilité ; de sorte que nous serions enfermé dans un cercle sans issue. Mais nous contesterons que le tout des phénomènes que comprennent le temps et l’espace soit aussi le tout des phénomènes de l’univers. Si l’on identifie ces