établis dans la société, la même concurrence doit produire le même effet dans tous. »
der leurs sueurs du jour et du lendemain. Pour ceux-là, au contraire, le bien-être s’accroît, et il faudrait pousser bien loin l’esprit de système, pour mettre la position d’un membre de la vénérable confrérie des merciers ou des drapiers du moyen-âge au-dessus de celle des manufacturiers puissants qui remuent des millions dans le Lancashire, à Lyon, à Mulhouse, et qui nous étonnent par le faste de leur existence.
Sans doute les capitaux se sont multipliés à l’infini et sont allés, en s’épanchant sur le monde, fertiliser, comme de riches alluvions, les contrées les plus pauvres, les plus stériles sous le rapport industriel. Sans doute cette multiplication de la richesse a dû en amener la dépréciation ; sans doute, nous marchons vers une époque où les prodiges de la mécanique, commanditée par le capital, feront de la chaussure, du vêtement, de la nourriture, des choses presque aussi gratuites que l’air, le ciel, le soleil, l’eau, l’électricité : mais qui voudrait proscrire ces bienfaits, et qui ne voit, d’ailleurs, que si les valeurs sociales sont devenues plus nombreuses et ont baissé de prix, elles sont devenues, par cela même, plus facilement accessibles ? Qu’importe à un capitaliste de voir dépérir entre ses mains des richesses, si ces richesses se reproduisent à l’infini ; que lui importe de posséder 100,000 fr., qui lui rapportent 10%, ou 200,000 qui produisent un intérêt de 5,000 fr. ; que lui importe encore de vendre, à frais égaux, dix aunes de brocard à 100 fr. ou vingt aunes à 50 fr. ? Sa situation sera la même, tandis que la société en masse aura hérité de cette abondance qui s’infiltrera peu à peu dans ses rangs les plus infimes. Déplorer cet avilissement des objets de consommation, ce serait donc déplorer la gratuité des rayons solaires, des forces naturelles, des fleuves ; ce serait méconnaître que la valeur est une chose abstraite, une véritable équation établie entre les frais de production et la demande des différents produits, — rien de plus ; ce serait, en un mot, sacrifier là substance à l’attribut, la réalité à l’idéal, et lâcher niaisement la proie pour courir après l’ombre. Loin de s’apitoyer sur la dépréciation des capitaux, il faut donc, au contraire, s’en réjouir au nom de toutes les classes de la société ; car cette dépréciation indique qu’ils se sont multipliés, et cette multiplication indique qu’ils se distribuent à un plus grand nombre d’individus. Qui dit valeur excessive d’un produit, dit monopole, consommation ; restreinte, et par conséquent, industrie sans débouchés, sans profits, qui dit valeur infime, dit consommation générale, et par suite, industrie florissante, s’appuyant sur ces bases solides qui sont les besoins de tous. Si bien que l’époque là plus prospère pour la société sera celle où les ateliers ; sans cesse en activité, produiront avec une sorte de fièvre ; où le travail, partout recherché, obtiendra de forts salaires ; où les produits, inondant les marchés, s’y vendront à assez bas prix pour que les plus pauvres y puissent atteindre, et assureront ainsi aux manufacturiers la clientèle des masses, la seule qui, en réalité, puisse commanditer sûrement une entreprise.
Voilà les conclusions auxquelles eût été conduit Ricardo s’il eût étudié de plus près les faits et en eût fait une analyse plus nette, plus exacte. Il n’eût pas abouti