Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/605

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multiplier le nombre des travailleurs. On aura donc ainsi accru les frais d’exploitation, pendant que la valeur des produits sera restée la même.

Mais l’expérience universelle nous apprend que le prix du blé et de tous les autres produits naturels, s’élève constamment à mesure qu’une nation grandit en richesse et se trouve contrainte à solliciter de nouvelles terres pour leur faire produire une partie de ses subsistances. Une légère réflexion suffira pour nous convaincre en effet que telles doivent être naturellement les conséquences des phénomènes économiques de ce genre.

La valeur échangeable de toutes les marchandises s’accroît avec les difficultés de leur production. Si donc par l’effet d’un travail additionnel, devenu nécessaire, la production du blé se compliquait de nouvelles difficultés, tandis que pour produire l’or, l’argent ; le drap, la toile etc., il suffirait du travail primitif, la valeur échangeable du blé hausserait comparativement à ces articles. Au contraire, cette valeur diminuerait toutes les fois que des améliorations introduites dans la production du blé ou de toute autre espèce de marchandises permettrait d’obtenir le même résultat avec moins de travail[1]. Ainsi nous voyons que les perfectionnements introduits en agriculture ou dans les instruments aratoires abaissent la valeur échangeable du blé[2], que les perfectionnements, appliqués aux machines qui servent dans l’industrie du coton, diminuent la valeur échangeable des étoffes de coton ; qu’enfin des procédés minéralogiques plus avancés, ou la découverte de mines plus abondantes en métaux précieux abaissent la valeur de l’or et de l’argent, ou, ce qui revient au même, élèvent le prix de toutes les autres marchandises. Toutes les fois que la concurrence pourra

  1. Des perfectionnements agricoles qui détermineraient une baisse dans le prix du blé, seraient un stimulant pour la population ; et, par suite, en accroissant les profits et favorisant l’accumulation, ils relèveraient encore le prix du blé et affaibliraient les profits. Mais il se peut qu’une population plus abondante subsiste avec les mêmes conditions de prix, de profits et de rentes : on attribuerait alors à ces améliorations agronomiques le pouvoir d’augmenter les profits et d’abaisser momentanément le taux de la rente.
  2. Les causes qui tendent à rendre plus difficile la production d’une quantité additionnelle de blé ; agissent incessamment au sein des pays qui sont en progrès, tandis que des améliorations importantes en agriculture ou dans les instruments aratoires, se succèdent plus rarement. Si ces causes contraires agissaient avec même intensité, le prix du blé ne serait exposé qu’à des variations accidentelle, provenant de mauvaises saisons, de salaires affaiblis ou accrus, d’altérations sur venues dans la valeur des métaux précieux par suite de leur abondance ou de leur rareté.