Page:Ricci - Trigault -Histoire de l'expédition chrestienne au royaume de la Chine, Rache, 1617.djvu/48

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Il n’y a aucunes loix anciennes en cet Empire, telles que sont entre nous celles des douze tables, & du droict Cesareen, selon lesquelles la Republique soit tousjours gouvernée. Mais celui qui premier de quelque famille prend les resnes de l’Empire, fait des loix nouvelles comme il luy plaist, que la posterité de la mesme famille est contrainte d’observer, & ne leur est pas aisement permis de les changer. C’est pourquoy ces loix que les Chinois gardent à present ne sont pas plus anciennes, qu’Humvu. Iceluy les a toutes ou faites, ou maintenues telles qu’il les avoit receues de ses devanciers, ayant principalement eu esgard à ce qu’il peust trouver moyen de continuer long temps la paix au Royaume, & l’Empire à sa posterité.

Pour ce que les limites de ce Royaume s’estendent si au long & au large, à cause de l’ignorance des terres d’outre-mer, les Chinois croient que leur Roy commmande à tout le monde, c’est pourquoy d’un nom gracieux ilz l’appellent encor à present, comme tousjours du passé, Thiencu, filz du ciel. Et d’autant qu’ilz adorent le ciel pour souveraine Deité, le nommer filz du ciel, c’est autant que l’appeller filz de Dieu. Communement toutesfois on ne l’appelle pas de ce nom. mais Hoamti, c’est à dire, Souverain Empereur, ou Monarque. Mais tous les autres Roys sont appeliez par les Chinois Guam, d’un titre beaucoup inférieur.

On dict que cet Humvu, duquel j’ay parlé, a esté excellent non seulement en vertu guerrière, mais encor homme d’esprit & fort judicieux. Cela est confirmé par plusieurs loix & ordonnances, par lesquelles il a affermy la Republique Chinoise. Entre icelles je feray chois de quelques unes plus remarquables, me ressouvenant tousjours de la briefveté que je me suis proposée. D’autant que (comme il se void par la suite des Annales) toutes les familles Royales sont descheues de la Royauté par les factions des parens du Roy, ou des plus grans du Royaume, qui la plus part du temps tenoient en main le gouvernement d’icelui, il a ordonné qu’à l’advenir aucun du sang Royal ne pourra parvenir à aucune charge publique, soit civile, soit militaire. Quant aux Capitaines, par l’aide desquelz il avoit delivré le Royaume de la tyrannie des Tartares, il leur a donné, & à leur posterité par droict hereditaire des offices de guerre. Et de crainte que la race Royale ne portast trop impatiemment d'estre rejettée de toute charge publique, il a honoré les filz des Roys du titre de Guam, c’est à dire, du nom de petit Roy, ou Roitelet, & leur a assigné des tres-amples rentes. Mais il ne les a pas constituez en terres, ou possessions, de peur que les serviteurs les obtinssent, ains en pension annuelle, que les Magistratz payent du thresor du Roy. Il a voulu aussi que tous les Magistratz les honorassent pour Roiteletz, mais qu’aucun