Page:Ricci - Trigault -Histoire de l'expédition chrestienne au royaume de la Chine, Rache, 1617.djvu/74

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palais Royal estoyent d’or ou de cuivre. Mais en verité elles sont de terre, ce que je puis asseurer les ayant toucheez de mes propres mains ; mais elles sont teintes de couleur jaune, & chacune presque attachée avec un clou aux poultres & soliveaux sur le toict ; car elles sont beaucoup plus grandes que les nostres ; la teste desquelz cloux est dorée, à fin que rien ne paroisse au palais Royal qui ne porte la couleur du Roy. Si quel qu’un rapportoit à son usage ceste couleur. ou dragons, il seroit tenu coulpable de leze Majesté, si n’est que d’adventure il fust du sang Royal.

Il y a quatre portes au palais Royal à chasque partie du monde, vis à vis l’un de l’autre. Tous ceux qui faisans chemin passent outre ces portes, descendent de cheval s’il vont à cheval, ou de la selle s’ilz sont portez en icelle, & marchent à pied jusqu’à ce qu’ilz les aient passéez. Tous font cela ; mais les plus grandz plus soigneusement & de plus loing ; & non seulement à Pequin, mais encor plus religieusement à Nanquin au palais des anciens Roys, encor que depuis plusieurs anneez aucun des Roys ne se soit retiré en icelui. Les portes du Midy, soir dedans, soit dehors sont trois. Le Roy a accoustumé entrer ou sortir par celle du milieu, les autres sont receus à droicte & à gauche  : par quoi cete porte du milieu n’est jamais ouverte que pour l’entrée ou sortie du Roy.

Les Chinois n’ont aucune autre datte ou marque de temps, soit en leurs livres imprimez, soit en tout instrumenr public, quel qu’il soit, si ce n’est celle de la creation & advenement à la couronne de celuy qui regne, comme nous avons accoustumé de faire de la nativité de nostre Seigneur Jesus-Christ, premiere année de nostre Salut. Quelquefois pour certaines causes le Roy a accoustumé de conferer un tiltre aux parens des premiers Magistratz, par quelque escrit fait par les Philosophes Royaux au nom du Roy. Les Chinois estiment tant cela, que c’est chose merveilleuse. Car pour l’obtenir, ilz n’espargnent aucune despence, & la conservent en la famille comme une chose d’honneur sacrée. Et il y a encor quelques autres tiltres exprimez en deux ou trois characteres, que le Roy donner aux vefves qui ont refusé jusqu’à la veillesse les secondes nopces, ou aux vieillardz qui ont vescu cent ans entiers, ou en autre semblable cas, desquelz on ne fait pas moins d’estime que des premiers. Ilz mettent ces inscriptions en veue sur l’entrée de leur maison  : & non seulement les Roys confèrent cest honneur, mais encor est-ce la coustume que les Mandarins en donnent à leurs amis. On erige aussi aux Magistratz, qui ont bien mérité de la republique, des arcz de marbre aux despens du public,