en eut un fils et une fille, et perdit sa femme après cinq ans d’une union qui lui fit goûter si peu d’agrément, qu’en se voyant libre, il jura solennellement de ne plus s’engager. Ladi Sara, sa fille, fut mise dans une pension près de Londres ; et l’héritier de son nom, seul objet de ses attentions, demeura dans le château d’Alderson, où Milord résidoit depuis son mariage.
Ce jeune enfant, enlevé à l’âge de quatorze ans, par une fièvre maligne, laissa sa sœur héritière d’une grande fortune. Je ne vous peindrai point ladi Sara, vous l’avez vue, Madame : élevée avec elle, vous eûtes le temps de connoître les qualités de son ame. Tant de surprise, d’attendrissement dans vos yeux, en apercevant son portrait chez moi, m’ont appris que ses traits n’étoient point effacés de votre souvenir. Ladi Sara joignoit aux grâces de la figure charmante qu’il offre à la vue, des sentimens nobles et généreux. Elle avoit l’humeur égale, le cœur sensible, et le naturel tendre. L’élévation de son esprit la rendoit capable de fermeté ; mais une extrême douceur la portoit vers la complaisance, et lui donnoit ce caractère heureux, aimable, qui fait le bonheur de ceux dont nous sommes environnés, et presque jamais le nôtre.
Milord Alderson regretta beaucoup son fils, non qu’il l’aimât avec tendresse, mais cet enfant devoit soutenir sa maison prête à s’éteindre, et porter un nom auquel Milord étoit fort attaché. La mort du jeune lord, détruisant ses espérances, il rappela sa fille, dans le dessein de la marier. Il la destina d’abord