Page:Riccoboni - Œuvres complètes, Tome 1, 1818.djvu/149

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avoit sacrifié à sa tendresse, et le prix dont il devoit payer tant d’amour. C’est de ce manuscrit d’où j’ai tiré ce que je viens de vous apprendre ; et Lidy m’a souvent répété dans la suite les circonstances du dernier des malheurs de l’infortunée Sara.

Elle étoit logée chez la veuve d’un officier subalterne, nommée mistriss Larkin. Cette femme avoit l’humeur douce, de l’esprit, et assez d’usage du monde. Ladi Sara passoit dans sa maison pour la femme d’un simple gentilhomme du comté de Kent. Mistriss Larkin, frappée de l’air de dignité répandu sur toute sa personne, sur ses moindres actions étonnée de sa grande retraite, regardant comme un mérite supérieur en elle le peu d’empressement qu’elle montroit à jouir des amusemens de la ville, et la solitude que s’imposoit une dame si jeune, si belle, si propre à briller dans le monde, conçut d’elle la plus haute idée, lui montra bientôt un attachement tendre, respectueux, et s’appliqua à prévenir ses désirs. Ladi Sara fut sensible à ses attentions ; sa société ne lui déplaisant point, mistriss Larkin passoit une partie des jours auprès d’elle.

Plus de six mois s’étoient écoulés depuis l’absence d’Edouard : un long siége avoit retardé les opérations de la campagne. Le passionné lord écrivoit à Sara dans l’attente d’une bataille qui devoit la terminer et le ramener aux pieds de la maîtresse de son cœur. Son impatience augmentoit celle de ladi Sara. Inquiète, troublée, elle adressoit au ciel des vœux ardens pour la conservation d’une tête si chère. Le retard d’un courrier la livroit à des terreurs mor-