beaux cheveux cendrés, des dents blanches et bien rangées, un souris doux et tendre, des grâces, un esprit naturel, la rendoient à douze ans une fille charmante. Elle reçut une éducation simple, apprit à chérir la sagesse, à regarder l’honneur comme sa loi suprême : mais vivant très-retirée, ses idées ne purent s’étendre ; elle n’acquit aucune connoissance du monde, et conserva long-temps cette tranquille et dangereuse ignorance des vices, qui, éloignant de notre esprit la crainte et la triste défiance, nous porte à juger des autres d’après nous-mêmes, et nous fait regarder tous les humains comme des créatures disposées à nous chérir et à nous obliger.
Madame Dufresnoi, tendrement attachée à cette jeune personne, songeoit avec douleur à l’état ou elle se trouveroit peut-être un jour : que feroit Ernestine, si la mort de son amie la laissoit sans secours ? Ne pouvant assurer son sort, elle voulut au moins lui donner un talent capable de lui procurer les besoins de la vie et même avec un peu d’aisance. Elle choisit la miniature, et fit venir chez elle un peintre, pour lui apprendre le dessin. Attentive, intelligente et docile, Ernestine s’appliqua, montra de grandes dispositions, les cultiva, fit des progrès, et promettoit de devenir habile, quand madame Dufresnoi, attaquée d’une fièvre maligne, fut en peu de momens réduite à la dernière extrémité : elle mourut le cinquième jour de sa maladie.
Henriette Duménil, sœur du peintre qui montroit à Ernestine, étoit liée d’amitié avec madame Dufresnoi ; elles logeoient près l’une de l’autre et se voyoient