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Page:Riccoboni - Œuvres complètes, Tome 1, 1818.djvu/504

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puis-je, sans expirer de douleur, vous annoncer mon départ, et l’événement qui doit le suivre ! Faut-il vous quitter, vous dire un éternel adieu ! faut-il percer votre cœur du même trait dont le mien se sent déchirer ! »

» Fille aimable ! née pour le bonheur de ma vie, digne du sort le plus brillant ; ah ! que le mien ne dépend-il de moi ! Le devoir, la reconnoissance, des engagemens pris depuis long-temps, renversent toutes mes espérances : mais en avois-je ? comment me suis-je flatté… Ah ! falloit-il vous conduire à partager une passion inutile ! que d’amertume, que de regrets se mêlent à des peines si vives ! me pardonnerez-vous ? ne me mépriserez-vous point ? ne me haïrez-vous jamais ? ma chère, ma tendre amie, daignez me rassurer sur mes craintes, dites-moi que vous me pardonnez ; ne me refusez pas une consolation si nécessaire à mon cœur, à mon cœur affligé.

» Le malheur de ma vie est enfin déterminé. Mon oncle a levé tous les obstacles qui éloignoient encore mon mariage ; il me contraint, il me force d’aller rendre des soins à mademoiselle de Saint-André. Dans une heure je pars avec son père ; il me mène à une terre où la maréchale de Saint-André nous attend. Sa fille sort demain du couvent ; on va nous présenter l’un à l’autre ; on nous unira bientôt, sans nous consulter, sans s’embarrasser si nos cœurs sont disposés à se donner. Quoi, ma chère Ernestine, je vais me lier, me lier à jamais ! et ce n’est point à vous…