Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 2, 1916.djvu/107

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Dieu et le salut des âmes[1]  » En 1747, étant retourné en France, ses supérieurs, estimant qu’il avait fait sa part de sacrifices, lui offrirent d’y demeurer. Lui, ne croyant pas avoir assez accompli pour son salut, refusa toutes leurs offres. Nous savons que, dans plusieurs occasions, il sauva la vie à des officiers anglais ; que le capitaine Hamilton, qui avait été témoin de ses bontés, l’avait en haute estime ; qu’après la déportation et son retour en France, il se fit l’ange consolateur des Acadiens réfugiés ; qu’il consacra son temps et ses ressources à leur procurer des adoucissements.

Son ami, l’abbé Maillard, qui l’avait initié à la langue micmaque et à la conduite des missions, fut, lui aussi, bien qu’à un degré moindre, enveloppé dans la même condamnation[2]. Maillard a passé les dernières années de sa vie à Halifax, au milieu de ceux qui avaient été ses ennemis. Or, il les a tous subjugués par l’ascendant de ses qualités et de ses vertus. À son chevet de mourant, le ministre protestant dont il s’était fait l’ami se trouvait présent ; et l’élite de la société d’Halifax, tant civile que militaire, fit cortège à son

  1. « Pensez à moy, ne m’oubliez pas, procurez pour moy auprès de Mr. Caris, souvenez-vous que je ne suis dans ce païs que par obéissance et pour suivre vos ordres, il y va de la gloire de Dieu et du salut des âmes, je ne sçaurois y suffire tout seul. » De Cobequitk, ce 3 Obre. 1740. Dans cet extrait, l’abbé demande un auxiliaire pour la paroisse française. Cette lettre ne porte pas de suscription, mais elle était évidemment adressée à M. Du Fau, Supérieur du Sém. des Miss. Étrang. à Paris. (Cf. Doc. inédits sur l’Acadie. Lettre de M. l’abbé Le Loutre. C. Fr., p. 26).
  2. Cf. Lettres de l’abbé Maillard, dans Documents inédits sur l’Acadie. Can.-Fr., p. 55 et seq. — Maillard, dont l’autorité morale n’a pas été contestée, parle dans les termes les plus élogieux de Le Loutre, à tous les points de vue, et dit de lui qu’il est très intelligent, instruit, homme de tête, grand caractère.

    Cf. Casgrain. Coup d’œil sur l’Acadie. Can.-Fr., 1888, p. 133,