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tion et à la pitié. Était-il d’une essence inférieure encore à celle du bandit, de l’assassin ? Nous ne saurions le dire. Ce qui est certain, c’est qu’il était sous l’empire d’une passion qui avait étouffé en lui tous les bons instincts, si tant est qu’il en eût jamais. Parti de très-bas, il était parvenu, jeune encore, à une position élevée. Or, il voulait monter plus haut, il voulait arriver à une situation éminente. Mais la fortune lui manquait pour atteindre au sommet de ses ambitions. La fortune ! Elle était là, dans le bétail des Acadiens. Le leur ravir à toute force, tel était le moyen qui s’était depuis longtemps imposé à son esprit, ainsi que nous le démontrerons plus tard jusqu’à l’évidence, pour réaliser son rêve de richesse et d’élévation sociale. Ce moyen, il en poursuivait l’exécution avec audace, mais aussi avec une prudence et une rouerie consommées.

Sous l’influence délétère de son ignoble projet, tout vestige de bon instinct avait disparu de son âme, en supposant que les bons instincts s’y fussent jamais montrés. Comment expliquer autrement qu’il ait pu donner à Monckton l’ordre infâme que nous venons de lire ? Nous ne croyons pas nous tromper : il s’agissait bien de s’emparer et de détenir les hommes, jeunes et vieux, lesquels seraient embarqués et expédiés d’abord ; ceci fait, when this is done, « il n’est pas à craindre que les femmes et les enfants ne s’enfuient avec les bestiaux ».

S’il pouvait toutefois rester un doute sur le sens que nous donnons à cette partie de ses instructions à Monckton, ses ordres à Handfield seraient propres à le dissiper complètement :

« À l’arrivée des navires de Boston dans le bassin d’Annapolis, vous embarquerez tous les habitants du district d’Annapolis, dont vous vous emparerez par tous les