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de la province. Le général Phillips leur fit cette concession que Sa Majesté a désapprouvée, et depuis, les habitants se prétendant sur un pied de neutralité entre Sa Majesté et ses ennemis, ont continuellement entretenu des intelligences avec les Français et les sauvages leur ont procuré des refuges, des vivres et autres secours et causé des ennuis au gouvernement. Pendant que les uns favorisaient les empiétements des Français par leurs trahisons, les autres les supportaient au moyen de la rébellion ouverte.

Trois cents d’entre eux viennent d’être pris les armes à la main dans le fort Beauséjour. Malgré leur mauvaise conduite par le passé. Sa Majesté a daigné me permettre d’accorder son pardon à tous ceux qui voudraient rentrer dans le devoir. En conséquence, j’ai offert à ceux qui n’avaient pas ouvertement pris les armes contre nous de rester en possession de leurs terres à condition de prêter le serment d’allégeance sans aucune réserve. Ils ont audacieusement et unanimement refusé de prêter le serment sans restriction, et s’ils croient pouvoir agir de la sorte au moment où nous avons une flotte considérable dans le port et de nombreuses troupes dans la province, que ne devons-nous pas craindre quand l’hiver qui approche, nous privera de notre flotte et que les volontaires de la Nouvelle-Angleterre enrôlés pour peu de temps, retourneront dans leur pays.

Les habitants ayant encouru par leur conduite, la confiscation de leurs terres et perdu tout droit à de nouvelles faveurs de la part du gouvernement, j’ai convoqué une séance du Conseil de Sa Majesté à laquelle étaient présents l’honorable vice-amiral Boscawen et le contre-amiral Mostyn, pour considérer les mesures qu’il va falloir prendre pour nous débarrasser sans danger et d’une manière efficace, de cette population qu’il était de notre devoir de faire disparaître depuis son refus de prêter le serment, et qui de plus, sera toujours un obstacle à la colonisation de cette province.

Le chiffre de cette population est de sept mille à peu près, et il n’est pas douteux qu’elle ira renforcer la population du Canada si après l’avoir chassée elle est laissée libre d’aller où il lui plaira. Le Canada n’ayant pas de terres défrichées pour un si grand nombre d’habitants, ceux qui sont en état de prendre les armes seront immédiatement employés à inquiéter cette colonie et les colonies avoisinantes. Pour empêcher cela il n’y a pas d’autre moyen praticable que de les distribuer par groupes dans les colonies ou ils pourront être utiles ; car le plus grand nombre de ces habitants sont forts et jouissent d’une excellente santé. Il leur sera ainsi bien difficile de se rassembler de nouveau et impossible de commettre des méfaits ; ils pourront par la suite rendre des services et avec le temps devenir de bons sujets.

Cette mesure a été jugée inévitable pour la sécurité de la colonie, et si Votre Excellence prend en considération qu’il est reconnu que la prospérité de l’Amérique du Nord dépend en grande partie de la préservation de cette colonie contre les empiétements des Français, je n’ai pas le moindre doute qu’elle nous donnera son concours, qu’elle recevra les habitants que je lui envoie maintenant et que suivant notre désir, elle prendra les moyens de les installer de manière à ce qu’ils ne puissent se grouper à l’avenir.