Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/140

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cette lettre des Lords du Commerce à Beloher était essentiellement un document de nature publique, et qui avait sa place marquée aux Archives. Pourtant on ne l’y voit pas. Elle y était encore en 1787, au temps où Brown préparait les matériaux pour l’histoire qu’il voulait écrire ; elle n’y était plus, alors qu’Haliburton rédigeait son ouvrage, lequel a paru en 1829. En fait, à cette époque, il ne restait plus un seul document public relatif à la période de la déportation. Écoutons ce qu’en dit Haliburton : « Il est tout-à-fait étonnant de voir qu’il n’y a pas trace de cet important événement, dans les Archives du Secrétariat de la Province, à Halifax. Je n’ai pas pu me rendre compte si la correspondance y avait été conservée, ou si les ordonnances, les réponses, les mémoires y avaient jamais été classés. Dans le Registre des lettres du gouverneur Lawrence, qui existe encore, on ne voit pas de dépêche aux Lords du Com-

    pas faite. Que le bétail pris aux Acadiens ait été converti par Lawrence en moyens de subvenir aux frais occasionnés par la déportation et ses conséquences, rien de plus certain. Mais que Lawrence en ait profité pour s’enrichir personnellement, et qu’il se soit servi des bateaux pour expédier dans les colonies des cargaisons de bestiaux qui y étaient vendues à son profit, cela est fort douteux. Il y a des explications fournies par les Archives à l’emploi des vaisseaux pendant un nombre de mois qui paraît invraisemblable, si l’on ne regarde qu’à la distance qu’ils avaient à parcourir d’un port à l’autre ; quand ils arrivèrent en Acadie, l’embarquement des prisonniers ne se fit pas tout de suite ; cet embarquement opéré, les vaisseaux demeurèrent des semaines et des semaines en rade ; arrivés à destination, comme ces déportés n’étaient pas attendus, et que surtout nulle part on ne se souciait de recevoir ces parias, il a fallu attendre qu’on eût statué sur leur sort et autorisé leur débarquement ; en certains cas, les Acadiens à peine débarqués durent être rembarques et transportés ailleurs, jusqu’en Angleterre… Tout cela a pris du temps. Et l’état de compte produit par la Cie Apthorp & Hancock, s’il a paru formidable aux yeux des Lords du Commerce, et s’il l’était en effet, peut cependant s’expliquer sans que l’on ait soin d’avoir recours à des conjectures plausibles si l’on veut, mais auxquelles manquent les données documentaires.