Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/174

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est le « médiévalisme ». Ce mot paraît avoir à son oreille le même son que « diabolisme ». Il en parle comme si, il y a cent cinquante ou deux cents ans, les Acadiens, par une exception rare dans l’histoire, eussent été en proie à ce monstre ; et l’on dirait que cela lui suffit pour les vouer au mépris public et pour justifier leur déportation. Cette haine du « médiavélisme », cette insistance à ramener cette question à tout propos, comme s’il eût fait là une importante découverte destinée à le mettre au rang des grands penseurs, et particulièrement son antipathie pour les idées humanitaires, nous montrent qu’il en est encore à l’A. B. C. de la science sociale. Il nous fait l’effet d’un écolier à ses premiers pas dans le champ de la connaissance. Si l’état d’esprit de Parkman était la plus haute expression de notre civilisation, il nous serait presque indifférent de retourner au moyen-âge, surtout à un moyen-âge fait de droiture et de moralité, — qualités qui ont caractérisé les Acadiens, si étroites qu’on les suppose. Mais il y a, dans tous les rangs de la société, nombre d’hommes amis du progrès sous toutes ses formes, capables de distinguer les grands côtés de notre civilisation, alors que Parkman, lui, ne semble en apprécier que les petits, des hommes qui voient dans l’essor matériel un moyen, un acheminement nécessaire vers une plus haute morale, vers le règne de ces idées humanitaires dont l’historien américain se moque. Considéré sous un autre angle, le progrès matériel n’a plus de sens. Ne pas comprendre, ne pas apprécier les idées humanitaires qui découlent du progrès matériel, et vers lesquelles le monde marche rapidement, est la preuve d’un esprit borné, d’une âme fermée aux nobles inspirations qui rehaussent la nature humaine. Haïr le « médiévalisme » avec autant d’intensité est le signe d’un esprit