Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/215

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nôtre. Il nous a été donné, sinon de vivre longtemps au milieu des Acadiens, du moins de les voir très souvent dans la paroisse de St-Grégoire où résidaient nos grands parents. Cet endroit est un des asiles où ils se réfugièrent après les huit années d’exil dans les ports de la Nouvelle-Angleterre. Ils fondèrent cette paroisse, où encore aujourd’hui il ne se trouve peut-être pas cinq familles dont l’origine ne soit pas acadienne. Le sol était très riche, mais très humide et très boisé. Les Acadiens, avec raison, ont toujours préféré les terres basses, malgré les difficultés plus grandes qu’entraînent leur défrichement et leur assainissement. Ceux qui se fixèrent à l’Acadie, près de St-Jean d’Iberville, et à St-Jacques l’Achigan, firent également choix de terres semblables. Ces paroisses comptent parmi les plus prospères de la Province de Québec. Pour ne parler que de St-Grégoire, nous croyons que la peinture de mœurs, faite par Brook Watson et Moïse de Les Derniers, s’applique aussi exactement que les circonstances pouvaient le permettre, à l’état de chose qui régnait là il y a vingt-cinq ans. Sauf cette différence que les parents pourvoyaient seuls à l’établissement de leurs enfants et que l’éducation y était très répandue, tout le reste devait être la représentation fidèle de ce qui existait à Grand-Pré voilà cent trente-sept ans. Les différends se réglaient encore par le moyen d’arbitres ; nous n’avons entendu parler que d’un seul procès, et jamais d’une naissance illégitime ou d’un scandale public. Il n’y a jamais eu, et je crois qu’il n’y a pas encore, à l’heure qu’il est, de débit pour la vente des spiritueux. La coutume y existait toujours de pourvoir à l’automne aux besoins des pauvres pendant l’hiver : l’on portait à leur domicile tout le bois, les provisions, les vêtements qui leur étaient nécessaires