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APPENDICES XI


LA DÉPORTATION DES ACADIENS.


(Travail donné à l’Université Laval, de Québec, le 29 janvier 1918)

Le sujet que nous avons choisi de traiter est le plus tragique de l’histoire d’Amérique, et l’un des plus abominables qu’offrent les annales de l’humanité, pourtant assez fertiles en horreurs. Pour lui trouver un point de comparaison il faut sortir des temps que l’on appelle civilisés, remonter au delà des vingt siècles de l’ère chrétienne : l’an 587 avant Notre-Seigneur, les Juifs de Jérusalem et des environs furent transportés en pays étrangers, et alors s’ouvrit pour eux cette période douloureuse connue sous le nom de captivité de Babylone. Les Assyriens, leurs vainqueurs, avaient ainsi l’habitude d’emmener prisonniers partie des peuples qu’ils s’étaient soumis et de les employer aux travaux forcés. Mais outre que ce fait s’est passé a une époque primitive et qu’il a été commis par des barbares, il échappe, par d’autres côtés aux appréciations humaines : l’histoire sacrée le revendique comme l’une de ces calamités directement providentielles qui relèvent des desseins divins à l’égard du peuple choisi.[1]

Pour nous en tenir au cadre suffisamment large et rempli formé par l’ère chrétienne, nous ne trouvons rien dans tout ce vaste passé, qui ressemble à la déportation de tout un peuple opérée en Acadie, à partir de septembre 1755. Cette chose, à laquelle nous ne refusons pas l’originalité, a-t-elle eu son pendant depuis ? Dans un compte-rendu du tome premier de l’ouvrage d’Édouard Richard sur l’Acadie, que nous sommes en train de publier, le Boston Transcript faisait la remarque suivante : « Cet ouvrage offre un intérêt en quelque sorte actuel, à raison de ce qui se passe en Belgique, où les Allemands, sous le prétexte que la présence à l’arrière de tant d’hommes valides nuit au succès

  1. Cf. IV, Rég. XXIV, 3. « Factum est autem hoc per verbum Domini contra Judam… » II. Par. XXXVI, 9-22. Maspero, Hist. anc. des peuples de l’Orient. Liv. IV, ch. XII.