Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/54

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en connaissance de cause, puisqu’il n’ignorait pas que les sauvages, pour les y contraindre, avaient brûlé leurs habitations ; il n’ignorait pas les démarches de ces habitants pour obtenir de revenir sur leurs terres. D’ailleurs leur situation, nonobstant tout cela, n’eût pas été moins justifiable. Mais là où le gouverneur ment le plus effrontément, c’est lorsqu’il affirme qu’il fut forcé d’inclure les Acadiens de la péninsule dans la mesure de déportation, parce qu’après la prise de Beauséjour, ils avaient entretenu les mêmes sentiments déloyaux que ceux de leurs compatriotes désertés. Car nous avons prouvé que, même pendant le siège de Beauséjour, Lawrence s’était emparé par supercherie d’une partie de leurs armes, et que, sur un simple ordre, les habitants avaient livré celles qui leur restaient, ainsi que leurs bateaux ; que, quinze jours après, sans qu’il y eût eu le moindre acte d’insoumission de leur part, sans qu’ils eussent commis quoique ce soit qui pût être considéré comme déloyal, leur déportation était virtuellement décidée, et que même elle l’avait été bien avant la prise de Beauséjour. La loyauté de ces gens, sous un régime tel que celui de Lawrence, ne pouvait guère reposer sur le sentiment — l’homme n’étant pas fait pour aimer les chaînes ni ceux qui l’en chargent ; — elle avait pour base leur devoir et leur intérêt ; et c’était là tout autant que l’on pouvait leur demander ; c’était même plus que l’on ne pouvait attendre d’eux, sous l’oppression qu’ils subissaient.

L’on voit que, dans cette lettre aussi bien que dans celle du 18 octobre, les détails sont fort maigres[1]. Il devait, en

  1. Nous avons dit que le MS. original n’avait reproduit que 18 lignes de cette lettre, qui, toute tronquée qu’elle est dans Akins, se trouve encore être