Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/81

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donner lieu aux plus grands déchirements. Ainsi le voulait l’édit impitoyable de Lawrence : tout devait être sacrifié à sa parfaite exécution.

Comme on s’indignait ouvertement de le voir inexorable, Winslow profita de l’arrivée de cinq vaisseaux pour procéder sans tarder à l’embarquement. Dans la matinée du 10 septembre, il fit avertir les prisonniers par le père Landry, qui servait d’interprète, que deux cent cinquante d’entre eux, en commençant par les jeunes gens, seraient embarqués à l’instant ; qu’ils n’avaient qu’une heure pour se préparer, attendu que la marée était sur le point de baisser. « Landry fut extrêmement surpris, dit Winslow, mais je lui dis qu’il fallait que la chose fût faite, et que j’allais donner mes ordres. »

N’ayant pas devant les yeux le journal de Winslow, nous laisserons Casgrain raconter cet épisode de l’embarquement[1]:

  1. 1° Richard aurait pu ouvrir ses guillemets un peu plus haut, car le chapitre cinquième du Pèlerinage au Pays d’Évangéline lui fournit de la matière depuis quelques pages déjà. 2° Dans notre tome ii, ch. xxix p. 400, en note, nous avons relevé l’observation d’un critique au sujet de l’aveu que fait ici l’auteur d’Acadie, à savoir « qu’il n’a pas sous les yeux le Journal de Winslow ». Nous avons ajouté que l’objection n’a plus sa raison d’être, étant donné que nous possédons le texte imprimé de ce fameux Journal, et qu’au besoin nous allons consulter l’original conservé aux archives de la Massachusetts Historical Society. Aussi tout en laissant Richard emprunter à Casgrain le récit de l’embarquement, nous reproduisons ci-après le compte-rendu même de Winslow (Journal Ibid. P. 108-9-10. Arch. Can., loc. cit. P. 78-9.) :

    « 10 septembre. — J’ai remarqué ce matin parmi les Français une agitation inaccoutumée qui me cause de l’inquiétude. J’ai réuni mes officiers auxquels j’ai fait part de ce que j’avais remarqué et après avoir examiné la situation, il fut décidé à l’unanimité de séparer les prisonniers. Afin de protéger le service de Sa Majesté et de mettre tout le monde à l’abri du danger, nous convînmes de faire monter cinquante prisonniers sur chacun des cinq vaisseaux arrivés de