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jamais à combattre les sauvages habitant les pays dont ils s’emparaient au nom du roi de France, qu’ils s’en firent au contraire des alliés fidèles, même dans les circonstances les plus critiques. L’on n’ignore pas qu’il en fut tout autrement dans les colonies anglaises : pour une raison ou pour une autre, les anglo-américains ne surent pas se concilier l’affection des indigènes : ceux-ci se livrèrent souvent contre eux à des actes de cruauté et de vengeance qui provoquèrent des représailles terribles de la part des Anglais, représailles qui se terminèrent souvent par l’extermination de ces tribus.

« Enfin, dit Rameau[1], s’il est un point où éclata surtout l’intelligence des colons français, ce fut dans la juste appréciation de la topographie et des circonstances locales qui les entouraient, dont ils tirèrent constamment un si excellent parti ; c’est par là qu’ils parvinrent à se soutenir dans leur défense et à faciliter leurs attaques. La sûreté et la rapidité du coup d’œil, l’habileté des combinaisons, la promptitude de la résolution, l’énergie de l’action ne le cédaient en rien, chez eux, à la vigueur du tempérament, à la souplesse du corps, à la sobriété et à la rusticité des habitudes. Le travail de l’intelligence se joignait donc à l’œuvre de la nature pour former en ce pays une race d’élite à laquelle rien n’a manqué, excepté la fortune, et le concours de la mère-patrie ! »

Les français succombèrent enfin, mais comme épuisés par leurs victoires, et après avoir longtemps, et à maintes reprises, au cours des luttes suprêmes, remporté des avantages qui tinrent en suspens le résultat. Quand Port-Royal se rendît, il avait déjà résisté deux fois à une armée supé-

  1. 43. Ibid., p. 301.