Page:Richardson - Clarisse Harlove, II.djvu/274

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entré volontiers, pour embrasser cette excellente fille.) Cl. il vous a raconté son histoire. Je répète que la mienne serait trop longue et trop triste. Le désordre où sa vue m’a jettée, et le peu de temps que j’ai à passer ici, ne me permettent aucun détail. S’il a quelques vues auxquelles sa justification puisse être utile, sans m’exposer personnellement à de nouveaux malheurs, je consens de bon cœur qu’il prenne à vos yeux toutes les couleurs de l’innocence. (le souvenir de mon amour, et son excellent caractère, ont plaidé pour moi dans ce moment. Elle a repris néanmoins :) Cl. le spécieux séducteur ! Dites-moi seulement, mademoiselle, s’il n’y a point quelque porte dérobée, par laquelle je puisse le fuir pour jamais. (quelle émotion de cœur j’ai sentie ! Je lui ai entendu lever la fenêtre.) Cl. où mène ce sentier ? Seroit-il impossible d’avoir un carrosse ? Il faut qu’il ait quelque démon familier, pour m’avoir trouvée dans cette maison. Ne puis-je me glisser dans quelque maison voisine, où je demeurerais cachée jusqu’à son départ ? Vous êtes des personnes d’honneur. Je n’ai pas toujours été assez heureuse pour tomber si bien. Ah ! Mesdames (d’une voix impatiente), accordez-moi votre secours, ou je suis une fille perdue. Ensuite, s’arrêtant ; n’est-ce pas là le chemin d’Hendon ? Ce lieu me paraît détourné. Je crois avoir entendu dire que le coche d’Hamstead ne laisse pas d’y passer. Mad Moore. je connais une fort honnête femme à Mill-Hill . Si vous vous croyez dans quelque danger, madame, vous pourriez être fort sûrement chez elle. Cl. ah ! Tout lieu du monde me convient, si je puis me dérober seulement à cette cruelle persécution. Quel est le village que j’aperçois sur la droite ? Mad M. c’est Highgate, madame. Miss R. à peu de distance est un hameau, qu’on appelle Northend . J’y ai quelques parens ; mais ils sont logés fort à l’étroit. Je ne suis pas sûre qu’ils puissent accommoder une dame telle que vous. (j’ai donné ces deux femmes au diable. Ne m’étais-je pas flatté de les avoir fait entrer un peu mieux dans mes intérêts ? Mais le sexe aime l’intrigue, Belford ; l’intrigue et les intriguans). Cl. une grange, un grenier seront un palais pour moi, si j’y trouve un asile contre ce persécuteur. (ma foi ! Ai-je dit en moi-même, elle est bien plus vive que moi dans ses ressentimens. Que diable lui ai-je donc fait, qui doive la rendre implacable ? Je ne t’ai rien caché, Belford. Mes crimes te paroissent-ils si noirs ? D’ailleurs, abandonner de si belles espérances de réconciliation ! Il faut que cette charmante personne ait le cœur infiniment sensible.) ses yeux sont alors tombés sur mon nouveau laquais, qui se promenait sous la fenêtre. Elle a demandé si cet homme n’était pas à moi. On lui a répondu que c’était un de mes gens. Je vois, a-t-elle dit, qu’il n’y a point d’espérance d’échapper ; à moins, mademoiselle, en parlant sans doute à Miss Rawlings, que vous ne m’accordiez un peu de protection pour sortir. Je ne saurais douter que ce valet n’ait ordre d’observer mes pas. Mais son misérable maître n’a pas droit de m’arrêter. Il ne m’empêchera point d’aller où je veux. S’il a l’audace de s’y opposer, je soulèverai tout le village contre lui. Mes chères dames ; quoi ! Vous