Page:Richardson - Clarisse Harlove, II.djvu/275

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n’avez pas une porte de derrière, par laquelle je puisse sortir, pendant que vous l’entretiendrez quelques momens ? Miss R. je prends la liberté de vous demander, madame, s’il n’y a donc aucun espoir d’accommodement. Ne feriez-vous pas mieux de consentir à le voir ? Il est certain qu’il vous aime. C’est un homme charmant. Vous pouvez l’irriter, et rendre votre situation plus fâcheuse. Cl. ah ! Mademoiselle ; ah ! Madame Moore, vous ne connaissez pas son caractère… je ne veux ni le voir, ni lui parler de ma vie. Madame Moore. cependant, Mademoiselle Rawlings, je ne vois pas qu’il ait blessé la vérité sur aucun article. Vous-même, madame, vous voyez combien il est respectueux, de ne pas se présenter devant vous sans votre permission. Il vous adore assurément. De grâce, madame, permettez-lui, comme il le désire, de vous parler un moment des lettres. (fort-bien, Madame Moore. Madame Moore, ai-je pensé, est une fort bonne femme. J’ai rétracté alors mes malédictions. Miss Rawlings a dit quelque chose, mais si bas, que n’ayant pu l’entendre, je n’en ai jugé que par la réponse.) Cl. mon embarras est extrême. Je ne sais à quoi me résoudre. Mais, Madame Moore, ayez la bonté de lui rendre ses lettres. Les voici. Prenez la peine de lui dire que je lui souhaite une heureuse entrevue avec sa tante et sa cousine. Les excuses ne lui manqueront pas plus pour ce qui s’est passé, que les prétextes pour ceux qu’il veut tromper. Dites-lui qu’il m’a ruinée dans l’estime de mes amis ; et que cette raison me rend plus indifférente pour celle des siens. (Madame Moore est venue à moi ; mais, craignant que dans son absence, mes intérêts ne fussent pas assez ménagés entre les deux autres, j’ai pris les lettres, et je n’ai pas fait difficulté d’entrer dans la chambre. Les deux dames s’étoient retirées dans le cabinet ; et je n’ai eu besoin que d’un coup d’œil, pour remarquer que ma charmante était attachée à quelque discours que Miss Rawlings écoutait avec la dernière attention. Elle avait le dos vers moi. Miss Rawlings l’a tirée doucement par la manche, pour lui faire appercevoir que j’étais déjà près d’elle. Quoi ! Monsieur, m’a-t-elle dit, en se tournant avec indignation, je ne serai nulle part libre et tranquille ? Qui vous appelle ici ? Qu’avez-vous à démêler avec moi ? On vous a rendu vos lettres, n’est-ce pas ? Lovel. je les ai, ma chère. Souffrez que je vous supplie de réfléchir sur vos propres résolutions. J’attends à chaque moment le capitaine ; j’en prends le ciel à témoin. Il m’a promis de cacher cette malheureuse aventure à votre oncle : mais que pourra-t-il penser, s’il vous trouve obstinée dans vos ressentimens ? Cl. j’aurai la patience, monsieur, de vous souffrir ici quelques momens, pour vous faire un petit nombre de questions devant ces deux dames, que vous avez prévenues en votre faveur par vos spécieux récits. Aurez-vous le front de dire que nous sommes mariés ? Mettez la main sur votre cœur, et répondez-moi : suis-je votre femme ? (Lovelace, me suis-je dit à moi-même, tu es trop avancé pour reculer, quelque ferme que soit ici l’attaque.) Lovel. mon très-cher amour ! Comment une telle question peut-elle vous venir à l’esprit ? Seroit-il de votre honneur ou du mien qu’elle parût douteuse ? Je le vois, ma chère, je le vois ; vous n’avez pas fait attention à la lettre du capitaine. (elle