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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/221

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du Chev. Grandisson.

avoit répondu que j’étois morte & que leurs services étoient inutiles : sur quoi, paroissant assez effrayés, ils avoient dit qu’il étoit tems pour eux de partir, & qu’ils espéroient qu’étant innocens de ma mort, & n’ayant pas eu d’autre intention que de servir Sir Hargrave, leurs noms ne seroient pas mêlés dans les procédures, quelque chose qui pût arriver.

En revenant à moi, je me trouvai au milieu des trois femmes, mais couverte d’une sueur froide, & dans un tremblement auquel je ne pouvois résister. Il n’y avoit pas de feu dans le Cabinet. Elles me conduisirent à la cheminée que les Ministres venoient de quitter. Elles me placerent dans un grand fauteuil ; car je n’avois pas la force de me soutenir ; & le secours qu’elles me donnerent fut de me frotter les tempes avec des liqueurs fortes. Que pensez-vous, ma chere Lucie, du caractere des hommes, qui sont capables de se faire un jeu si cruel de la santé & du bonheur des malheureuses Créatures, pour lesquelles ils se prétendent remplis d’amour ? Je crains de ne jamais redevenir ce que j’étois. Il me reste des étourdissemens & de petites agitations convulsives, qui ne sont point encore sans douleur.

La Mere & l’aînée des deux Filles me quitterent bientôt, pour rejoindre Sir Hargrave. Je ne puis juger de leurs délibérations, que par les effets qu’elles produisirent.