Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/27

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voir sans l’admirer. Votre curiosité, dites-vous, ne regarde que sa figure ; & vous ajoutez que la plûpart des femmes donnent plus de soin à cette espece de beauté, qu’à celle de l’ame. Peut-être conviendrai-je du moins que l’une excite plutôt leur jalousie que l’autre. Mais qui pourroit représenter Miss Byron, & ne s’arrêter qu’à sa figure, lorsque tous ses traits sont vivifiés par une ame, qui leur fait annoncer toutes les perfections, & qui donne de la dignité à son air, à ses regards, à ses moindres mouvemens ?

Personne au monde n’a plus de passion que moi pour la beauté. Jusqu’au moment où j’ai connu Miss Byron, j’étois du nombre de ceux qui ne considerent point d’autre avantage dans une femme. Sérieusement je regardois toutes les qualités de l’esprit, comme inutiles ou comme déplacées dans ce sexe. Vous savez, Madame, quelles libertés je m’accordois là-dessus, & vous m’en avez fait souvent des reproches. Une femme sage, une femme savante, me paroissoient des caracteres forcés, qui blessoient la nature. Je voulois que les femmes fussent tout amour, & rien de plus. Si j’y admettois un peu de prudence, c’étoit seulement ce qu’il en falloit pour distinguer l’homme sensé du sot ; & cela pour mon propre intérêt. Vous me connoissez de la vanité, Madame ; mais toute charmante qu’est Miss Byron, je défie le plus sensuel