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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/287

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du Chev. Grandisson.

frir de ses propres regrets, pour ne pas s’efforcer d’en vaincre les premieres saillies.

Mais j’espere, Monsieur, a repris mon Cousin, que vous ne vous rencontrerez point…

Je n’aurai de rencontre avec personne, M. Reves, à titre de Duel. Ma crainte ne sera jamais de passer pour un homme sans cœur. J’ai dans le fond de mes sentimens… pardonnez cette apparence de vanité, M. Reves : mais je ne vis pas pour le monde ; c’est pour moi que je vis, pour le censeur que je porte en moi-même.

M. Reves s’est efforcé d’applaudir des mains & des yeux, mais la voix lui a manqué, pour s’exprimer autrement. Il avoit été comme saisi de la noblesse avec laquelle ces derniers mots avoient été prononcés, & des rayons de lumiere qu’il avoit cru voir briller sur le visage du Chevalier Grandisson.

Il n’étoit pas à la fin. Sir Charles a continué : entre une infinité de mauvais usages que je déplore, il n’y en a point qui m’afflige tant que celui des Duels prémédités. Quelle est donc la magnanimité d’un homme, qui ne sauroit s’élever au-dessus des opinions vulgaires ? Combien ne connoissons-nous pas de Familles, où le deuil regnera éternellement pour la perte d’un Pere, d’un Fils, d’un Frere, enlevés par cette monstrueuse manie ? Un homme qui en appelle un autre, & qui l’engage dans