Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/43

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ques minutes, m’a conjurée de l’aimer. M. Greville m’a pressée, avec les mêmes instances, de lui déclarer que je le hais. Cette déclaration, m’a-t-il dit, est tout ce qu’il désire à présent. Il est bien étrange, a-t-il ajouté, qu’il ne puisse obtenir de moi, ni de l’amour, ni de la haine ; c’est un singulier personnage. J’ai tourné ses plaintes en badinage, avec ma liberté ordinaire ; & je lui ai répondu que si j’étois capable de haïr quelqu’un, il seroit l’homme du monde que je ferois moins scrupule d’obliger sur ce point. Il m’a fait de vifs remercimens.

Ces deux Messieurs paroissoient tentés de nous accompagner plus loin. Mais, comme ils ne sont jamais hors de leur route, l’envie leur seroit venue d’aller jusqu’à Londres, & par dégrés, nous les aurions eus sur les bras pendant tout le séjour que j’y dois faire. En remontant dans notre voiture, je les ai pressés fort sérieusement de nous quitter. Fenwick… mon ami… a dit Greville, il faut retourner, sur nos pas, Miss Byron prend son air grave. La gravité, sur son visage, est un langage assez clair pour nous. Ils ont pris congé tous deux fort respectueusement. Je les ai remerciés néanmoins de la civilité qui les avoit conduits sur notre passage, & principalement de la bonté qu’ils avoient de nous quitter. Principalement, a répété Greville : Ah, Mademoiselle, que vous en eût-il coûté pour nous épargner cette rigueur !