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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/95

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du Chev. Grandisson.

c’est que je suis le plus malheureux de tous les hommes, si vous ne me laissez pas l’espoir… Je l’ai interrompu à mon tour, pour le prier de ne pas nourrir des sentimens auxquels il m’étoit impossible de répondre. Il a poussé un profond soupir : on m’avoit assuré, a-t-il repris, que votre cœur, Mademoiselle, étoit sans engagement ; c’est là-dessus que j’ai fondé mes présomptueuses espérances.

Je lui ai dit naturellement qu’on ne l’avoit point trompé, & que je n’ai point encore vu l’homme avec lequel je puisse souhaiter d’être engagée par les nœuds du mariage. M. Fouler en a conclu qu’il pouvoit donc espérer du tems, de ses assiduités, de son respect, de sa passion sans bornes… Ô M. Fouler, lui ai-je dit, ne me croyez ni ingrate, ni insensible : mais les jours & les années ne peuvent apporter de changement dans un cas de cette nature. Je ne me sens capable que de vous estimer. Mais vous avez donc vu quelqu’un, Mademoiselle, pour qui vous croyez pouvoir prendre des sentimens plus favorables que pour moi ? Cette question étoit pressante, & j’aurois pu me dispenser d’y répondre. Cependant je lui ai répété que je n’avois encore vu personne dont je pusse désirer de faire mon Mari. Il a baissé les yeux avec un soupir. J’ai ajouté : M. Fouler va reconnoître à ma franchise, l’excellente opinion que j’ai de lui ; je lui avouerai que parmi tous les hommes que j’ai vus, s’il y