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Histoire

la froideur qui avoit succédé, dans des termes aussi honorables pour moi, qu’humilians pour lui-même. L’état désespéré, où il se voyoit réduit, lui fit regarder ces aveux comme une condition nécessaire à son repentir. Dans les soins que je continuois de lui rendre, il me prioit souvent de lui répéter les conseils & les maximes qu’il se reprochoit d’avoir méprisés. Il me demanda mille fois pardon, de la conduite qu’il avoit tenue avec moi, & lorsqu’il en parloit à sa famille, il la supplioit de me regarder, non-seulement comme le conservateur de sa vie, mais comme le restaurateur de sa raison & de ses mœurs. Il poussa ses généreux regrets, jusqu’à faire voir une Lettre que je lui avois écrite avant notre séparation, & qui contenoit ce que l’amitié m’avoit fait imaginer de plus touchant, contre les emportemens du plaisir. Toutes ces circonstances firent prendre une haute opinion de mes principes. Aussi la reconnoissance ne peut-elle aller plus loin dans une famille. Le Pere s’affligeoit de ne savoir comment témoigner la sienne, à un homme que sa naissance & sa fortune mettoient au-dessus de ce qu’il pouvoit lui offrir. La Mere, avec une liberté plus aimable qu’on ne la trouve ordinairement dans les Dames d’Italie, donna ordre à sa Fille de me regarder comme un quatrieme Frere, qui lui avoit conservé le troisieme. Le Baron déclara qu’il se croiroit malheureux toute sa vie, & que sa santé ne se rétabliroit jamais,