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Histoire

Caroline suivit mon conseil. Elle s’appuya sur moi, pour se traîner de son mieux jusqu’au bas des dégrés. Une nouvelle abondance de larmes tomba de ses yeux, lorsqu’elle fut à la porte de la salle à manger. Elle trembloit comme une feuille ; & s’asseyant dans le passage, elle me dit qu’elle ne pouvoit aller plus loin. Aussitôt, une voix, à laquelle nous savions qu’il falloit obéir, se fit entendre assez brusquement : où sont donc mes Filles ? Caroline, Charlotte, n’est-ce pas vous que j’ai entendues descendre ? La Femme de charge, qui se trouvoit dans l’office, accourut à nous d’un air empressé : Mesdemoiselles, Mesdemoiselles, votre Papa vous demande. Et nous, malgré la foiblesse de l’une & la répugnance de l’autre, nous retrouvâmes l’usage de nos jambes, & nous entrâmes dans la salle, sous les yeux de notre Pere ; ma Sœur toujours appuyée sur mon bras.

Le premier accueil fut d’un homme étonné. Que diable signifie ce spectacle ? Quels mouvemens de tragédie ? Quelle marche composée ? Les femmes sont naturellement Comédiennes : mais il est trop tard, Caroline. La Piéce est finie. Ce rolle est de trop.

Monsieur ! dit ma Sœur avec un sanglot, en levant les deux mains, & les joignant d’un air pitoyable ! Je pleurai pour elle ; & pour moi-même, si Miss Byron le veut, dans un cas plus éloigné.

Il reprit : c’est donc vous, Caroline, qui